Accueil > INTERNATIONAL > Victoire du Labour de Tony Blair

Victoire du Labour de Tony Blair

vendredi 6 mai 2005, par nassim

Alors que le dossier irakien risquait de compromettre les chances du New Labour, le premier ministre Tony Blair, affaibli, avait demandé à ce que les britanniques le jugent sur son bilan économique, son point fort.

Tony Blair a remporté un

Tony Blair

troisième succès sans précédent aux élections législatives au Royaume-Uni mais le Premier ministre ressort fragilisé d’un scrutin marqué par le net recul de sa majorité travailliste. Alors que le Labour disposait d’une solide avance de 161 voix dans la chambre des Communes issue du scrutin de juin 2001, il ne comptera plus que 60 à 80 voix de majorité dans la nouvelle assemblée où l’opposition conservatrice et libérale démocrate progresse. Usé par huit années de pouvoir, affaibli par les controverses sur sa gestion de la crise irakienne, Tony Blair, qui fête vendredi son 52e anniversaire, rentre certes dans l’histoire comme le premier chef de gouvernement travailliste à obtenir un troisième mandat d’affilée à Downing Street. Avant lui, seule Margaret Thatcher, la "Dame de fer" des conservateurs, avait accompli une telle performance.

Mais le score électoral du New Labour - 36% selon les projections - est le plus bas pour un parti vainqueur et Tony Blair devra composer avec l’aile gauche frondeuse de sa formation, qui lui reproche depuis des mois son soutien indéfectible à George Bush et l’orientation libérale donnée à sa politique. Des défis de première importance l’attendent pourtant, à commencer par le référendum sur le traité constitutionnel européen qu’il a promis d’organiser l’année prochaine. Face à une opposition en net redressement, il aura aussi à assumer, à partir de juillet, la présidence semestrielle de l’Union européenne et préparer le sommet du G8 sous présidence britannique en juillet à Gleneagles, en Ecosse.

"L’IRAK A DIVISÉ LE PAYS"

"Il est clair que le peuple britannique a souhaité le retour d’un gouvernement travailliste mais avec une majorité réduite", a reconnu Tony Blair après l’annonce de sa réélection dans la circonscription minière de Sedgefield, dans le nord-est de l’Angleterre, qu’il représente à Westminster depuis 1983. La mine sombre, il a reconnu que l’Irak expliquait en partie cette moindre performance. "L’Irak, a-t-il dit, est un sujet qui a divisé notre pays mais j’espère que nous pourrons être de nouveau unis."

"Son statut au sein du Parti travailliste va être atteint", juge Anthony King, professeur à l’Essex University. "Il n’est plus le magicien qu’il était."

"Le résultat est bien meilleur pour les conservateurs qu’ils ne le pensaient. Dans une certaine mesure, ces élections ont été une sorte de référendum sur Blair et je pense qu’elles l’affaiblissent considérablement", analyse Mark Wickham-Jones, de la Bristol University.

Le Parti tory enregistre certes sa troisième défaite d’affilée et repart pour quatre nouvelles années dans l’opposition. Mais, sous la houlette de Michael Howard, 63 ans, qui a mené une campagne agressive sur le thème de l’immigration et a mis en doute jour après jour l’intégrité de Blair, accusé de mensonge sur le dossier irakien, il redresse la tête après les échecs retentissants de 1997 et 2001.

"Il semble (...) que M. Blair va gagner un troisième mandat et je l’en félicite", a déclaré ce dernier après avoir été réélu dans sa circonscription de Folkestone, dans le sud-est de l’Angleterre.

Mais, estimant que "le temps de l’action et non plus des discours était venu pour (Tony Blair)", le chef des Tories a également jugé que ces élections du 5 mai 2005 constituaient un "pas significatif" vers un retour au pouvoir des Tories, rejetés dans l’opposition depuis 1997. Troisième force politique du pays, les libéraux démocrates restent handicapés par le système électoral (un scrutin majoritaire à un tour) mais progressent eux aussi, récoltant à l’évidence les fruits de leur opposition à la guerre en Irak - que les députés tories avaient approuvé.

"L’ère d’un système politique à trois partis dans tout le Royaume-Uni est maintenant avec nous", a lancé leur leader, Charles Kennedy, réélu dans les Highlands.

GORDON BROWN RENFORCÉ

Usé par huit années de pouvoir, Tony Blair avait annoncé avant les élections que ce troisième mandat serait son dernier. Avec un Labour perdant au moins une quarantaine de circonscriptions et en recul dans la quasi-totalité du pays, ces élections pourraient même accélérer le départ du 10 Downing Street de "Sunny Tony" (Tony le Flamboyant), que certains politologues annoncent dans un délai d’un an à dix-huit mois.

Son chancelier de l’Echiquier, Gordon Brown, sort lui renforcé de ce scrutin. Considéré comme le principal architecte des succès économiques de la Grande-Bretagne, seul pays du G7 à avoir échappé à la récession consécutive aux attentats du 11 septembre 2001, le ministre travailliste des Finances est également présenté comme son successeur probable.

"Je promets que nous écouterons et apprendrons, de sorte que nous puissions servir encore mieux notre pays et nos communautés dans les années à venir", a-t-il dit après son élection dans la circonscription écossaise de Kirkcaldy et Cowdenbeath.

"Ce résultat va mettre un point d’interrogation au-dessus de la tête de Blair. Cela rend plus probable qu’il démissionne dans un an ou dix-huit mois", estime Kevin Theakston, enseignant à la Leeds University, pour lequel "le pouvoir va se déplacer vers les murs du 11 Downing Street", la résidence du chancelier de l’Echiquier.

"Ce n’est plus qu’une question de patience pour Gordon Brown", note Mark Wickham-Jones.

Source : reuters.fr