Comme j’ai eu à le dire et à l’écrire, Chadli ne déroge pas à ses habitudes, recourant une fois encore à la parentèle (1) dont il n’a cessé d’user et d’abuser. Pourquoi choisir la wilaya d’El Tarf pour s’adonner comme il a eu à le faire un certain 20 septembre 1988, et s’engager comme à l’accoutumée dans une diatribe aussi haineuse que confuse, souvent décousue et au verbe obscur. Ce pamphlet, en fait, n’a de vérités que celles-là mêmes qui sont énoncées par lui, croyant à tort qu’il est le seul à les détenir. Pourquoi maintenant et pas avant ? Pourquoi, pour l’hommage rendu à Amar Laskri dit Amara Bouglez, certains furent invités et d’autres intentionnellement oubliés ? Cette réunion n’était-elle pas orchestrée à l’avance pour, simplement, donner la parole à Chadli Bendjedid ? D’ailleurs - sauf erreur de ma part -, aucun compte rendu ne reprend l’hommage rendu par Chadli à la mémoire de feu Amara Bouglez, ce grand officier de l’ALN, commandant de la Base de l’Est, connu surtout pour son grand sens de l’organisation. Chadli s’est surtout distingué par son discours haineux, prenant ses propres compagnons pour cible. A cette occasion, Chadli s’est distingué par des invectives et des insultes à mon endroit également.
Dire de moi que je fus « un espion de la France », c’est s’empêtrer dans ses contradictions : pourquoi m’avoir alors accepté dans la fonction d’adjoint militaire de la zone qu’il commandait à l’époque, c’est-à-dire de mars 1959 à mai 1960, puis sous son commandement lorsque lui-même était adjoint au commandant Abderrahmane Bensalem, de 1960 à l’Indépendance ? Pourquoi, alors que je ne suis à ses yeux qu’un transfuge, ne s’était-il pas passé de mes services ? Au contraire, j’ai grimpé les plus hautes marches sous son commandement puisque, à la mort de Boumediène, je n’étais que lieutenant-colonel, commandant les troupes aéroportées. Il est vrai que j’ai bénéficié d’une formation acquise auprès des Français. Mais, au fait, que faisaient mes compatriotes ? Vivaient-ils donc sous d’autres cieux ? Le fait est que nous étions tous logés à la même enseigne. Nous étions tous, qui militaire qui émigré ; très peu étaient installés à leur propre compte, commerçants ou cultivateurs, beaucoup, sinon l’immense majorité était exploitée par les colons, des khemas (2). Je serais bien curieux de savoir pourquoi Chadli prétend au patriotisme plus que les autres ? En tout état de cause, l’essentiel pour moi, était d’avoir su profiter de cette opportunité pour la mettre d’emblée, au sortir de l’école, à la disposition de la Révolution armée(3). Le patriotisme doit-il être l’apanage de ceux qui, comme Chadli, ont rejoint, je ne sais dans quelle circonstance, le maquis avant moi ? Que non ! Car pour lui, seule l’ancienneté comptait ; cette sempiternelle ancienneté qu’il aimait à brandir comme certains de ses prédécesseurs l’avaient fait avant lui. Critère unique, comme s’il s’agissait d’un faire valoir. Il est vrai aussi que certains de mes compagnons ont eu à rejoindre le maquis quelque temps avant moi et plus jeunes encore. Combien sont-ils ? D’autres sont venus après. A-t-il été donné à beaucoup d’Algériens de militer comme moi, au FLN, alors que je n’avais pas vingt ans, et de passer quatre années consécutives dans les glorieuses unités de combat de l’ALN ! (cf. Mémoires de guerre. Editons ANEP)
UNE SYMPATHIE POUR LE COMPLOT DES COLONELS
Si servir pendant près de cinq années sans relâche équivaudrait à rejoindre la Révolution « sur le tard », comme le prétend Chadli, je suis en droit de me poser la question de savoir à quels motifs répond ce procès d’intention ? Il se trouve que dans la fonction qui était la mienne, personne - je dis bien personne ! - n’est en droit de me reprocher une quelconque ignominie, surtout celle aussi diffamatoire, « espion de la France », proférée de surcroît par celui qui fut le premier magistrat du pays. Lesquels propos ont été rapportés par les journaux El Watan et Le Soir d’Algérie. Ester Chadli serait inutile, tant le chemin qui mène à l’obtention d’une réparation morale est tortueux et sans issue. Dire aussi que je rendais compte au GPRA et aux « 3 B » (c’est-à-dire Krim Belkacem, Abdelhafidh Boussouf et Lakhdar Bentobal), cela eût été un grand honneur pour moi ! Cette structure qu’il montre du doigt qu’était le Gouvernement Provisoire de la République Algérienne ne représentait-elle pas le flambeau de l’Algérie en guerre ? Les hommes qu’il cite seraient-ils donc des traîtres à la patrie ? Malheureusement, je n’ai pas eu l’honneur de servir aux côtés de ces trois héros, car je fus affecté, à ma demande, en zone opérationnelle par le colonel Si Nacer et n’ai eu à rendre des comptes qu’à mon chef hiérarchique, Chadli Bendjedid. La rancœur exprimée dans ce cas précis démontre, si besoin est, sinon son appartenance du moins sa sympathie pour le complot des colonels qu’il a toujours su dissimuler. Puisque Chadli s’est voulu didactique, en s’adressant à une audience composée non seulement de moudjahidine mais aussi d’historiens et d’étudiants, pourquoi n’a-t-il pas pris le soin de traiter le sujet des officiers de l’armée française dans son ensemble ? En fait, l’ALN, puis l’ANP ont connu trois catégories d’officiers formés par les Français. Il y eut d’abord ceux qui, à partir de 1957, ont rejoint l’ALN, et ainsi successivement jusqu’en 1961. Si cette catégorie n’a pris le maquis qu’à partir de 1957, c’est parce que ceux qui en ont fait partie étaient les premiers à sortir de ces écoles. Une seconde catégorie était composée de ceux qui, ayant choisi de rester de l’autre côté de la barrière, étaient sélectionnés par les Français pour encadrer les éléments appelés à l’époque « Force locale ». Composée de militaires algériens, elle avait pour mission d’assurer le maintien de l’ordre jusqu’aux élections. Cette force puisait sa légitimité des accords d’Evian qui mirent en place un Exécutif chargé de gérer la période transitoire, installé à Rocher Noir (Boumerdès). Lors de son déploiement sur le terrain, l’ordre nous fut intimé de procéder au désarmement des personnels la composant et de les renvoyer dans leurs foyers. Ils n’opposèrent aucune résistance. Cette force était organisée en compagnies commandées par des lieutenants. Quelques mois plus tard, l’ANP, confrontée à des problèmes de formation, quelques-uns parmi ces lieutenants furent enrôlés dans les rangs de l’ANP, sous le vocable « d’officiers intégrés ». J’étais commandant des forces terrestres chargé de l’avancement et du dégagement des cadres, lorsque ce même Chadli Bendjedid, président de la République, m’ordonna de mettre ces personnels à la retraite avant terme, ce que je fis, alors que ces derniers totalisaient une vingtaine d’années de service. Ils terminèrent leur carrière dans des entreprises nationales. Chadli confond-il entre ces différentes catégories ? En ce qui me concerne, je suis de ceux qui appartiennent à la première catégorie et je ne peux qu’être fier d’avoir tourné le dos à une carrière pour servir mon pays quand il a eu besoin de ses enfants, n’en déplaise à Chadli Bendjedid et à tous ceux qui, à un moment ou à un autre, ont tenté de jeter l’anathème !
Dire de moi que je fus « un espion de la France », c’est s’empêtrer dans ses contradictions : pourquoi m’avoir alors accepté dans la fonction d’adjoint militaire de la zone qu’il commandait à l’époque, c’est-à-dire de mars 1959 à mai 1960, puis sous son commandement lorsque lui-même était adjoint au commandant Abderrahmane Bensalem, de 1960 à l’Indépendance ? Pourquoi, alors que je ne suis à ses yeux qu’un transfuge, ne s’était-il pas passé de mes services ? Au contraire, j’ai grimpé les plus hautes marches sous son commandement puisque, à la mort de Boumediène, je n’étais que lieutenant-colonel, commandant les troupes aéroportées. Il est vrai que j’ai bénéficié d’une formation acquise auprès des Français. Mais, au fait, que faisaient mes compatriotes ? Vivaient-ils donc sous d’autres cieux ? Le fait est que nous étions tous logés à la même enseigne. Nous étions tous, qui militaire qui émigré ; très peu étaient installés à leur propre compte, commerçants ou cultivateurs, beaucoup, sinon l’immense majorité était exploitée par les colons, des khemas (2). Je serais bien curieux de savoir pourquoi Chadli prétend au patriotisme plus que les autres ? En tout état de cause, l’essentiel pour moi, était d’avoir su profiter de cette opportunité pour la mettre d’emblée, au sortir de l’école, à la disposition de la Révolution armée(3). Le patriotisme doit-il être l’apanage de ceux qui, comme Chadli, ont rejoint, je ne sais dans quelle circonstance, le maquis avant moi ? Que non ! Car pour lui, seule l’ancienneté comptait ; cette sempiternelle ancienneté qu’il aimait à brandir comme certains de ses prédécesseurs l’avaient fait avant lui. Critère unique, comme s’il s’agissait d’un faire valoir. Il est vrai aussi que certains de mes compagnons ont eu à rejoindre le maquis quelque temps avant moi et plus jeunes encore. Combien sont-ils ? D’autres sont venus après. A-t-il été donné à beaucoup d’Algériens de militer comme moi, au FLN, alors que je n’avais pas vingt ans, et de passer quatre années consécutives dans les glorieuses unités de combat de l’ALN ! (cf. Mémoires de guerre. Editons ANEP)
UNE SYMPATHIE POUR LE COMPLOT DES COLONELS
Si servir pendant près de cinq années sans relâche équivaudrait à rejoindre la Révolution « sur le tard », comme le prétend Chadli, je suis en droit de me poser la question de savoir à quels motifs répond ce procès d’intention ? Il se trouve que dans la fonction qui était la mienne, personne - je dis bien personne ! - n’est en droit de me reprocher une quelconque ignominie, surtout celle aussi diffamatoire, « espion de la France », proférée de surcroît par celui qui fut le premier magistrat du pays. Lesquels propos ont été rapportés par les journaux El Watan et Le Soir d’Algérie. Ester Chadli serait inutile, tant le chemin qui mène à l’obtention d’une réparation morale est tortueux et sans issue. Dire aussi que je rendais compte au GPRA et aux « 3 B » (c’est-à-dire Krim Belkacem, Abdelhafidh Boussouf et Lakhdar Bentobal), cela eût été un grand honneur pour moi ! Cette structure qu’il montre du doigt qu’était le Gouvernement Provisoire de la République Algérienne ne représentait-elle pas le flambeau de l’Algérie en guerre ? Les hommes qu’il cite seraient-ils donc des traîtres à la patrie ? Malheureusement, je n’ai pas eu l’honneur de servir aux côtés de ces trois héros, car je fus affecté, à ma demande, en zone opérationnelle par le colonel Si Nacer et n’ai eu à rendre des comptes qu’à mon chef hiérarchique, Chadli Bendjedid. La rancœur exprimée dans ce cas précis démontre, si besoin est, sinon son appartenance du moins sa sympathie pour le complot des colonels qu’il a toujours su dissimuler. Puisque Chadli s’est voulu didactique, en s’adressant à une audience composée non seulement de moudjahidine mais aussi d’historiens et d’étudiants, pourquoi n’a-t-il pas pris le soin de traiter le sujet des officiers de l’armée française dans son ensemble ? En fait, l’ALN, puis l’ANP ont connu trois catégories d’officiers formés par les Français. Il y eut d’abord ceux qui, à partir de 1957, ont rejoint l’ALN, et ainsi successivement jusqu’en 1961. Si cette catégorie n’a pris le maquis qu’à partir de 1957, c’est parce que ceux qui en ont fait partie étaient les premiers à sortir de ces écoles. Une seconde catégorie était composée de ceux qui, ayant choisi de rester de l’autre côté de la barrière, étaient sélectionnés par les Français pour encadrer les éléments appelés à l’époque « Force locale ». Composée de militaires algériens, elle avait pour mission d’assurer le maintien de l’ordre jusqu’aux élections. Cette force puisait sa légitimité des accords d’Evian qui mirent en place un Exécutif chargé de gérer la période transitoire, installé à Rocher Noir (Boumerdès). Lors de son déploiement sur le terrain, l’ordre nous fut intimé de procéder au désarmement des personnels la composant et de les renvoyer dans leurs foyers. Ils n’opposèrent aucune résistance. Cette force était organisée en compagnies commandées par des lieutenants. Quelques mois plus tard, l’ANP, confrontée à des problèmes de formation, quelques-uns parmi ces lieutenants furent enrôlés dans les rangs de l’ANP, sous le vocable « d’officiers intégrés ». J’étais commandant des forces terrestres chargé de l’avancement et du dégagement des cadres, lorsque ce même Chadli Bendjedid, président de la République, m’ordonna de mettre ces personnels à la retraite avant terme, ce que je fis, alors que ces derniers totalisaient une vingtaine d’années de service. Ils terminèrent leur carrière dans des entreprises nationales. Chadli confond-il entre ces différentes catégories ? En ce qui me concerne, je suis de ceux qui appartiennent à la première catégorie et je ne peux qu’être fier d’avoir tourné le dos à une carrière pour servir mon pays quand il a eu besoin de ses enfants, n’en déplaise à Chadli Bendjedid et à tous ceux qui, à un moment ou à un autre, ont tenté de jeter l’anathème !
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