Role Positif?8
En 1840 nos services donnaient au Maroc huit millions d’habitants. Le chiffre est incertain; mais il est vraisemblable. Le recensement de 1936 donnera sept millions après trente ans d’une guerre nationale très meurtrière. Or, la surface « utile » de la Régence était d’environ un tiers supérieure à celle du Maroc, où on ne trouve aucune région d’un peuplement comparable à celui de la Kabylie. Ces chiffres justifient donc les estimations d’Hamdan. Le premier recensement complet de l’Algérie, nous le savons, est e 1872. Ceux de 1866, 1861 et 1856 commencent à pouvoir être utilisés pour la région d’Oran, qui fut accessible, connue et dénombrée par les Bureaux arabes beaucoup plus tôt que celle d’Alger-Constantine. En revanche, les chiffres concernant cette dernière sont fantaisistes. On s’en rend compte en constatant que la diminution pour la province d’Oran, de 1866 à 1872, est beaucoup plus forte que pour celles d’Alger et Constantine, qui pourtant avaient seules souffert de l’effroyable guerre kabyle de 1871. En leur appliquant le même taux de diminution que pour celle d’Oran (évaluation certainement au dessous de la réalité), on arrive à un chiffre total minimum de 2.900.000 musulmans pour 1866: 1865, les services de Napoléon III donnaient d’ailleurs le chiffre de trois millions. Le taux de décroissance, relevé pour ces six années et appliqué sur quarante ans (de 1831 à 1871), justifie lui aussi les chiffres d’Hamdan.
Si toute évaluation d’ensemble tirée des recensements antérieurs à 1872 est sans valeur statistique, des indices certains et des indications monographiques nous donnent quelques précieuses certitudes. Les constantes ethniques d’abord. Les études de 1860 à 1880 menées par le colonel Warnier et le général Faidherbe donnent environ 70 à 75% de Berbères; 25 à 30% d’Arabes et de Maures, les Maures étant fixés à 5% environ. En 1838, Guilbert donne, d’après les indications de l’état-major, 430.000 Maures, ce qui correspondrait donc à un total de 8.600.000 habitants. Baudicour, en 1853, donne 1.600.000 Arabes et Maures, ce qui correspondrait à un total de 5.300.000. En 1865, le nombre officiel des Maures est de 145.000, soit un total de 2.900.000 Algériens.
Ensuite, les constantes géographiques. La population musulmane de la province d’Oran fait un peu moins du sixième du total algérien, celle de Constantine environ la moitié, celle du Sud et du Sahara algérien environ le dixième. D’après le recensement de 1865, la province d’Oran devait compter environ 700.000 Musulmans, ce qui correspondrait à un total de 4.500.000. En 1841 les travaux de Lamoricière évaluent la densité minimum de la province d’Oran (qui faisait alors 116.000 kilomètres carré) de 12 à 13 par kilomètre carré, ce qui donnerait un total de 7.700.000 habitants pour l’Algérie. E, 1844, la commission scientifique cite le chiffre de 700.000 pour l Sud et le Sahara, ce qui donnerait, pour cette année, un total de 7.000.000. Le bey de Constantine donnait, en 1831, le chiffre de 5.000.000 environ pour sa province. Ce qui confirme exactement les chiffres d’Hamdan.
Autres indices constants en milieu maghrébin: le nombre des tribus, et celui des chevaux. Le décompte complet des tribus ne fut connu qu’en 1869: Il donna 659 tribus ou restes de tribu. (En 1830, nos services n’en dénombraient que 120!) La tribu maghrébine est en moyenne de 15 à 20.000 âmes (au Maroc, en 1936, 330 tribus pour sept millions d’âmes). Cet indice justifie donc à son tour les chiffres d’Hamdan. L’indice constant des chevaux, en milieux maghrébin non mécanisé - Bugeaud le confirme - est d’un cheval pour 25 à 30 habitants. (Il était environ de 1 pour 30 dans le Maroc de 1930). Lamoricière décompte 80.000 chevaux pour la seule province d’Oran en 1941. Ce qui donne au total 400.000 chevaux pour les trois provinces, donc au moins dix millions d’âmes. A partir de 1840, un fait capital se produit: la guerre totale, pénétrant l’intérieur du pays, bouleverse les idées reçues. La fiction du million d’Algériens apparaît de plus en plus difficile à maintenir. Dès lors, Bugeaud lui-même citera le chiffre de huit millions. En 1844, le général de Bellonnet, spécialiste des questions algériennes et rapporteur du budget de l’Algérie, déclare à la Chambre que la population « sur laquelle on n’a eu jusqu’ici que des notions inexactes », doit être évaluée à environ sept millions d’âmes. A la chambre, personne, pas même les algéristes, ne discutera ce chiffre. Telle était aussi l’évaluation du ministre de la Guerre, le maréchal Soult, d’après les renseignements de son ministère. A la même époque, d’ailleurs, dans ses rapports aux sociétés missionnaires, l’évêque d’Alger la fixe à six millions. Très attentif à la Kabylie qu’il rêvait de convertir, il en savait l’importance.
En 1840 nos services donnaient au Maroc huit millions d’habitants. Le chiffre est incertain; mais il est vraisemblable. Le recensement de 1936 donnera sept millions après trente ans d’une guerre nationale très meurtrière. Or, la surface « utile » de la Régence était d’environ un tiers supérieure à celle du Maroc, où on ne trouve aucune région d’un peuplement comparable à celui de la Kabylie. Ces chiffres justifient donc les estimations d’Hamdan. Le premier recensement complet de l’Algérie, nous le savons, est e 1872. Ceux de 1866, 1861 et 1856 commencent à pouvoir être utilisés pour la région d’Oran, qui fut accessible, connue et dénombrée par les Bureaux arabes beaucoup plus tôt que celle d’Alger-Constantine. En revanche, les chiffres concernant cette dernière sont fantaisistes. On s’en rend compte en constatant que la diminution pour la province d’Oran, de 1866 à 1872, est beaucoup plus forte que pour celles d’Alger et Constantine, qui pourtant avaient seules souffert de l’effroyable guerre kabyle de 1871. En leur appliquant le même taux de diminution que pour celle d’Oran (évaluation certainement au dessous de la réalité), on arrive à un chiffre total minimum de 2.900.000 musulmans pour 1866: 1865, les services de Napoléon III donnaient d’ailleurs le chiffre de trois millions. Le taux de décroissance, relevé pour ces six années et appliqué sur quarante ans (de 1831 à 1871), justifie lui aussi les chiffres d’Hamdan.
Si toute évaluation d’ensemble tirée des recensements antérieurs à 1872 est sans valeur statistique, des indices certains et des indications monographiques nous donnent quelques précieuses certitudes. Les constantes ethniques d’abord. Les études de 1860 à 1880 menées par le colonel Warnier et le général Faidherbe donnent environ 70 à 75% de Berbères; 25 à 30% d’Arabes et de Maures, les Maures étant fixés à 5% environ. En 1838, Guilbert donne, d’après les indications de l’état-major, 430.000 Maures, ce qui correspondrait donc à un total de 8.600.000 habitants. Baudicour, en 1853, donne 1.600.000 Arabes et Maures, ce qui correspondrait à un total de 5.300.000. En 1865, le nombre officiel des Maures est de 145.000, soit un total de 2.900.000 Algériens.
Ensuite, les constantes géographiques. La population musulmane de la province d’Oran fait un peu moins du sixième du total algérien, celle de Constantine environ la moitié, celle du Sud et du Sahara algérien environ le dixième. D’après le recensement de 1865, la province d’Oran devait compter environ 700.000 Musulmans, ce qui correspondrait à un total de 4.500.000. En 1841 les travaux de Lamoricière évaluent la densité minimum de la province d’Oran (qui faisait alors 116.000 kilomètres carré) de 12 à 13 par kilomètre carré, ce qui donnerait un total de 7.700.000 habitants pour l’Algérie. E, 1844, la commission scientifique cite le chiffre de 700.000 pour l Sud et le Sahara, ce qui donnerait, pour cette année, un total de 7.000.000. Le bey de Constantine donnait, en 1831, le chiffre de 5.000.000 environ pour sa province. Ce qui confirme exactement les chiffres d’Hamdan.
Autres indices constants en milieu maghrébin: le nombre des tribus, et celui des chevaux. Le décompte complet des tribus ne fut connu qu’en 1869: Il donna 659 tribus ou restes de tribu. (En 1830, nos services n’en dénombraient que 120!) La tribu maghrébine est en moyenne de 15 à 20.000 âmes (au Maroc, en 1936, 330 tribus pour sept millions d’âmes). Cet indice justifie donc à son tour les chiffres d’Hamdan. L’indice constant des chevaux, en milieux maghrébin non mécanisé - Bugeaud le confirme - est d’un cheval pour 25 à 30 habitants. (Il était environ de 1 pour 30 dans le Maroc de 1930). Lamoricière décompte 80.000 chevaux pour la seule province d’Oran en 1941. Ce qui donne au total 400.000 chevaux pour les trois provinces, donc au moins dix millions d’âmes. A partir de 1840, un fait capital se produit: la guerre totale, pénétrant l’intérieur du pays, bouleverse les idées reçues. La fiction du million d’Algériens apparaît de plus en plus difficile à maintenir. Dès lors, Bugeaud lui-même citera le chiffre de huit millions. En 1844, le général de Bellonnet, spécialiste des questions algériennes et rapporteur du budget de l’Algérie, déclare à la Chambre que la population « sur laquelle on n’a eu jusqu’ici que des notions inexactes », doit être évaluée à environ sept millions d’âmes. A la chambre, personne, pas même les algéristes, ne discutera ce chiffre. Telle était aussi l’évaluation du ministre de la Guerre, le maréchal Soult, d’après les renseignements de son ministère. A la même époque, d’ailleurs, dans ses rapports aux sociétés missionnaires, l’évêque d’Alger la fixe à six millions. Très attentif à la Kabylie qu’il rêvait de convertir, il en savait l’importance.
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