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Association des providers algériens : “L’internet est menacé”

samedi 9 octobre 2004, par Hassiba

Les providers algériens vivent aujourd’hui une situation très difficile. Beaucoup d’entre eux sont au bord de la faillite. Des centaines de cybercafés ont cessé leur activité.

L’activité internet est menacée en Algérie. Tel est le cri d’alarme lancé par l’Association algérienne des fournisseurs de services internet (Aafsi) lors d’une assemblée générale tenue, jeudi dernier, au Centre de recherche en informations techniques et scientifiques (Cerist). Cette association a dressé un constat exhaustif sur le secteur de l’internet en Algérie et lancé un appel pressant aux pouvoirs publics pour sauver cette activité menacée, dit-on, de disparition en Algérie.

Elle soulignera que “les providers vivent aujourd’hui une situation très difficile puisque beaucoup d’entre eux sont au bord de la faillite et des centaines de cybercafés ont arrêté leur activité”. Les fournisseurs de services internet (ISP), dont la majorité sont des PME-PMI, ont le sentiment d’être sacrifiés, selon l’Aafsi, sur l’autel des intérêts des grandes entreprises de télécommunications qui “semblent être les seules à faire l’objet des attentions des autorités du secteur”. Le président de l’Aafsi, M. Younès Grar, dira : “Nous avons constaté un déclin de l’utilisation d’internet durant les six derniers mois”, tout en indiquant dans la foulée qu’“il y a déjà deux providers qui ont fermé boutique et d’autres qui risquent de les suivre”. Continuant sur la même lancée, M. Morsli, PDG d’Icosnet, affirmera : “Nous avons enregistré 700 accès simultanés à Constantine durant la saison 2002-2003 sur 13 points de présence.”

Aujourd’hui, il constatera que “l’accès à internet a baissé de 50 %, soit 200 à 250 accès simultanés”. Ce provider relèvera, par ailleurs, que “l’adsl ou l’internet à haut débit rencontre, actuellement, beaucoup de difficultés car les lignes utilisées ne sont pas homogènes mais hétérogènes”. Il remettra en cause, également, les chiffres donnés par le ministre des Télécommunications sur le nombre d’abonnés au réseau Adsl qui ne dépasse pas, selon lui, 1 000 abonnés.
Quant aux causes de ce déclin, l’association des providers notera qu’“elles sont liées essentiellement aux pratiques discriminatoires, aux coûts d’exploitation exorbitants consécutifs aux prix de monopole imposés aux ISP et à l’absence de visibilité et de règles transparentes, reconnues, établies et appliquées dans les relations des ISP avec les gestionnaires du secteur des télécommunications”.

Elle dénoncera, aussi, la politique de “deux poids, deux mesures” adoptée par les pouvoirs publics, notamment pour la téléphonie sur internet (voix sur IP) car “au moment où la voix sur IP était interdite brutalement pour les providers, les grands opérateurs de télécoms en Algérie la lançaient à grande échelle pour les communications internationales”. Pis, l’association a relevé que “beaucoup d’ISP avaient dans les équipements de voix sur IP soit près d’un milliard de centimes, ils ont subi de grosses pertes et se sont retrouvés en difficultés financières”. Plus explicite, M. Grar ajoutera que “le cahier des charges élaboré par l’Arpt comporte des conditions exorbitantes telles que le payement d’une redevance annuelle de 20 à 25 millions de centimes et une caution”.

Il soulèvera, toutefois, le problème de la bande passante que “les ISP ont été obligés de la payer à un prix de monopole exorbitant à l’ex-ministère des Télécommunications puis à Algérie Télécom”.
Ce prix est 12 fois supérieur à celui du marché international jusqu’en 2003, martèlera-t-il, et malgré une baisse de 50 % sur le prix du Mega consentie en 2004 par Algérie Télécom, le prix reste 20 fois supérieur à celui du marché international. Il fustigera, au passage, Algérie Télécom qui ne respecte pas les règles concurrentielles. Et pour cause, les prix des liaisons spécialisées restent des prix de monopole excessivement chers sans relation avec leur prix de revient réel, précisera-t-il.

Abondant dans le même sens, il estimera que “l’accès au réseau, la dotation en équipements et moyens de travail et le choix de partenaires sont soumis à des règles qui continuent d’être obscures”. De même, il a déclaré que “les tarifs de téléphonie fixe dont dépend l’accès du consommateur à internet et les prix de la voix sur IP ont augmenté de plus de 200% en 2003 puis de 100% en septembre 2004, et des augmentations de 100 % sont encore annoncées pour les mois qui viennent alors que la tendance mondiale est à la baisse de ces tarifs”.

L’Aafsi a déjà déposé une saisine auprès de l’Arpt mais n’a pas reçu encore de réponse et elle compte saisir le conseil de la concurrence pour dénoncer “toute anomalie constatée concernant le respect des règles de la concurrence telles que les définit la loi”. Elle revendique la fixation d’une taxe téléphonique unique à l’échelle nationale pour l’accès téléphonique à internet, soit une taxe égale à 50 % de la tarification locale et la reconnaissance claire de la voix sur IP comme service internet.

Par Faïçal Medjahed, Liberté