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La douzième tripartite pour lancer le pacte économique et social en Algérie

lundi 21 février 2005, par Hassiba

Le 3 et 4 mars prochain verra la tenue de la douzième tripartite. Une réunion que beaucoup considèrent comme étant la dernière à avoir cette forme.

Si, pour l’instant, rien n’a filtré sur les points qui seront soumis à l’ordre du jour, les « concessions » faites par le secrétariat national de l’Union générale des travailleurs algériens (UGTA) et ses revendications laissent présager des points que le syndicat voudra débattre.Le patronat a, lui aussi, émis quelques revendications lors de la dernière bipartite et de récentes déclarations d’une partie des patrons quant à la création de la zone euro-méditerranéenne de libre-échange et de l’accession de l’Algérie à l’OMC. Le gouvernement a aussi quelques exigences mais qui sont parfois à l’opposé de celles de ses partenaires. Ce sera donc une tripartite consensuelle mais où les gagnants ne seront pas nombreux. Selon un observateur averti, cette tripartite consacrera l’UGTA comme la principale bénéficiaire de cette rencontre.

La révision du 87 bis
Parmi les points sur lesquels l’UGTA se veut intransigeante : la révision de l’article 87 bis. Cette revendication de la centrale syndicale est liée au fait que l’augmentation du salaire minimum interprofessionnel garanti (SMIG) n’a pas été répercutée par les employeurs sur les revenus des travailleurs. Le gouvernement serait enclin à accepter d’ouvrir le dossier en raison des dernières concessions de l’UGTA sur les privatisations et l’acceptation de l’avant-projet de loi sur les hydrocarbures. Autre exigence de l’UGTA : la promulgation d’un code du travail. Sur ce point aussi, le gouvernement accepterait le principe, il mettra à plat tous les textes internationaux liés au BIT et entamera la confection de ce code qui permettra d’autres avancées dans le cadre des lois sociales et au bénéfice des travailleurs. Mais pour cet observateur, l’acceptation par l’UGTA du principe de la privatisation qu’elle a conditionnée de plusieurs manières bloque le gouvernement dans sa volonté de cession des entreprises publiques.

La préservation de l’emploi et le maintien de l’activité sont, pour cet analyste, une aberration qui bloque les éventuels repreneurs particulièrement dans des secteurs moribonds comme le textile et l’agroalimentaire. Cet écueil qui a été perçu par bon nombre d’observateurs comme un « revirement de la centrale » ne serait en fait qu’une consolidation des positions du syndicat. Aussi, le gouvernement pourrait, lors de cette réunion, demander à la centrale syndicale d’assouplir sa position pour permettre aux éventuels acquéreurs de procéder plus facilement à l’adaptation de l’entreprise aux réalités du marché. Faute de quoi, il est plus simple pour un éventuel repreneur de procéder à son investissement et réduire d’autant la part de marché des EPE.

Qui payera les allocations familiales ?
Autre revendication du gouvernement, le transfert du paiement des allocations familiales par les employeurs ou par un mécanisme à déterminer et selon un échéancier à convenir. Cette mesure, si elle est adoptée, ne changera pas grand-chose à la position du syndicat mais risque de faire grincer des dents les représentants du patronat. Le gouvernement, en acceptant de revoir l’article 87 bis relatif au SMIG, verra ses dépenses de fonctionnement augmenter de près de 30 milliards de dinars mais, s’il décroche l’accord sur les allocations familiales, cela lui permettra de réduire un peu les transferts sociaux qui sont à la charge de l’Etat depuis le vote de l’amendement de Louisa Hanoune.

Autre volet que pourrait mettre sur la table la centrale syndicale, après les déclarations du ministre en charge des participations de l’Etat relatives aux 480 EPE en voie de liquidation judiciaire : les salaires impayés. Or cette revendication ne peut être à nouveau discutée, selon notre analyste, qui affirme que le dossier a été clos lors de la tripartite de 1998. Sur cette base, les discussions qui seront sûrement cordiales entre les membres du gouvernement et ceux du secrétariat national de l’UGTA risquent de voir l’opposition du patronat qui n’a pas grand-chose à engranger lors de cette tripartite.

Qu’il soit privé ou public, le patronat sera dans une position défensive car les accords de libre-échange avec l’Union européenne et l’accession de l’Algérie à l’OMC affaibliront l’entreprise algérienne par le démantèlement tarifaire et la forte concurrence prévisible. Les différents soutiens des pouvoirs publics que pourrait demander le patronat risquent de rester lettre morte et n’avoir pour conséquence qu’un maintien artificiel d’activités qui doivent péricliter à terme.

La volonté du gouvernement à gagner les deux fronts ouverts, à savoir la lutte contre l’informel et la corruption, risque de fragiliser une partie du secteur privé qui a pris l’habitude de travailler sans facture et de ne pas se soumettre aux obligations légales concernant les impôts ou les cotisations aux différentes caisses d’assurances.Cette douzième tripartite est annoncée par les partenaires sociaux comme celle qui lancera la réalisation du pacte économique et social dont la signature est prévue pour le premier trimestre 2006. Elle consacrera sûrement des avancées pour les travailleurs. Il reste à savoir quels avantages en tireront les autres partenaires.

Par Amine Echikr, La Tribune