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Le pétrole flambe et hypothèque la croissance européenne

mardi 5 avril 2005, par Hassiba

Sommes-nous vraiment en marche vers un pétrole à 105 dollars le baril comme le suggèrent les économistes de Goldman Sachs ?

Si les cours du brut ont franchi un nouveau record hier en séance - plus de 57 dollars à Londres, plus de 58 dollars à New York - les spécialistes de la banque considèrent ce niveau tout à fait insuffisant pour calmer la formidable demande mondiale de pétrole.

Peut-être, mais le bond de 40% du cours du brent depuis janvier suffit à hypothéquer la croissance européenne. Dans ses prévisions pour la zone euro, revues en baisse à 1,6% pour 2005, la Commission européenne se fonde sur un baril à 50,9 dollars cette année et 48 dollars l’an prochain. Nous en sommes déjà loin. « Je pense que nos prévisions (NDLR : de croissance) peuvent être revues à la baisse dans les prochains mois », a reconnu hier le commissaire européen aux affaires économiques et monétaires, Joaquim Almunia. Sur les marchés aussi, les investisseurs commencent à s’émouvoir de cette hausse irrépressible du prix des matières premières en général, et de l’énergie en particulier (voir graphique). Comme en témoigne l’extrême sagesse des taux d’intérêt sur le marché obligataire, ce n’est pas tant l’inflation que l’on craint mais la panne économique. Une perspective qui a fait flancher les Bourses européennes hier.

Il faut dire que personne n’entrevoit la fin des tensions actuelles. Les spéculateurs sont évidemment très actifs, mais ils ne font qu’exploiter les déséquilibres profonds du marché. En l’occurrence, les craintes d’une insuffisance de l’offre. D’ici à deux semaines, le monde saura si l’Opep augmente une nouvelle fois sa production de 500 000 barils par jour, comme l’a promis hier son président Ahmad Fahd al-Sabah. Mais il y a peu de chance que ces barils supplémentaires suffisent à calmer les esprits et les cours. Une décision semblable, prise à Ispahan fin mars, n’a eu aucun effet calmant, sachant que 500 000 barils représentent 1,8% de la production actuelle du cartel. Le marché doute que ce surplus puisse étancher la soif chinoise, alors que Pékin s’apprête à se constituer des réserves stratégiques de pétrole. Quant à l’Amérique, les observateurs ne peuvent que constater sa propension à prospecter d’hypothétiques gisements plutôt qu’à économiser le précieux carburant.

Face à cette pénurie d’offre, les groupes pétroliers cherchent avant tout à sécuriser leurs approvisionnements. En annonçant hier le rachat d’Unocal pour 18 milliards de dollars, le numéro deux américain ChevronTexaco va augmenter de 15% sa production et ses réserves avérées. Ce mariage américano-américain aurait pu être international puisque Unocal était convoité aussi par des groupes italien et chinois.

Par Muriel Motte, lefigaro.fr