Accueil > ECONOMIE > L’OMC relance la libéralisation du commerce mondial

L’OMC relance la libéralisation du commerce mondial

lundi 2 août 2004, par Hassiba

Les 147 membres de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) ont approuvé hier la relance des négociations sur la libéralisation des échanges internationaux, après que pays riches et pays pauvres eurent conclu un accord de longue haleine sur l’agriculture.

Au terme de cinq jours de dures négociations au siège de l’institution à Genève, les délégués ont approuvé dans la nuit un compromis rédigé samedi après-midi par une trentaine de pays qui avaient discuté presque sans interruption depuis vendredi midi. Ces pays, réunis en comité restreint autour du directeur général de l’OMC, Supachai Panitchpakdi, sont tombés d’accord sur le délicat dossier de l’agriculture, qui oppose les pays du Nord à ceux du Sud. L’accord prévoit ainsi pour la première fois d’ouvrir des négociations sur la fixation d’une date limite pour supprimer les subventions aux exportations du Nord, accusées de ruiner les paysans des pays en développement. Il prévoit aussi la baisse des autres subventions à l’agriculture.

Le compromis permet de donner un « cadre » aux négociations lancées à Doha (Qatar) fin 2001 sur un abaissement généralisé des barrières douanières dans le monde. Un échec, après celui de la conférence de Cancun (Mexique) en septembre 2003, aurait risqué de renvoyer aux calendes grecques la conclusion du cycle dans tous ses aspects concrets (montants chiffrés, calendriers d’application, etc.). Le cycle de Doha devait théoriquement être bouclé avant la fin de l’année, mais les pays membres ont décidé de repousser sine die la conclusion du cycle. L’accord prévoit simplement que les Etats « redoublent d’efforts » pour parvenir à un résultat dans la perspective de la prochaine conférence ministérielle qui aura lieu à Hongkong en décembre 2005. Avant la décision du conseil général, les pays en développement se sont félicités de l’accord en préparation. « Nous espérons que le projet d’accord-cadre va permettre l’élimination des subventions agricoles des pays industrialisés et de leurs soutiens internes qui faussent le commerce », a déclaré le ministre indien du Commerce, Kamal Nath, dont le pays a été à la pointe du combat contre les subventions.

L’accord marque « le début de la fin des subventions agricoles », s’est félicité le ministre brésilien des Affaires étrangères, Celso Amorim. Le groupe des pays pauvres du G90 a approuvé le document. « Les pays du G90 n’ont pas tout ce qu’ils réclament, mais ils veulent que le processus continue », a expliqué un délégué. Du côté des pays riches, les Etats-Unis, deuxième puissance subventionniste du monde après l’Union européenne, ont estimé que l’accord est « positif pour nous et pour l’OMC, pour les exportateurs, les consommateurs, les pays développés et les pays en développement », selon un porte-parole du représentant au Commerce Robert Zoellick. Le commissaire européen à l’agriculture, Franz Fischler, qui négocie au nom des Vingt-cinq, a indiqué qu’il avait obtenu le feu vert des pays membres de l’UE pour accepter le compromis agricole. Vendredi, la France avait été isolée au sein du Conseil européen, s’opposant seule à un précédent projet de compromis préparé par l’OMC. Le président Jacques Chirac avait jugé ce projet « inacceptable en l’état », estimant qu’il était laxiste envers les subventions agricoles américaines. En échange de concessions en matière agricole, les pays développés ont obtenu que des négociations s’engagent sur la baisse des droits de douane pour les produits industriels.

Un bon compromis pour les agriculteurs européens
L’accord conclu hier à l’Organisation mondiale du commerce (OMC) constitue « un bon compromis » pour les agriculteurs européens, a déclaré le commissaire européen à l’agriculture, Franz Fischler. « C’est un bon compromis pour nos agriculteurs. Il leur donne de la sécurité pour l’avenir et des perspectives claires et stables », a estimé M. Fischler lors d’une conférence de presse, peu après la conclusion d’un accord des 147 pays membres de l’OMC pour relancer les négociations sur la libéralisation des échanges mondiaux. Le commissaire a reconnu que les paysans et leurs organisations syndicales avaient des craintes envers la réunion de l’OMC à Genève et qu’il avait été « nécessaire de faire des compromis ». Mais il s’est félicité que l’accord « n’aille pas au-delà de la réforme » de la politique agricole commune approuvée il y a un an. Il a souligné que les aides découplées du niveau de production n’étaient pas remises en cause, que les soutiens liés à des limitations de production pouvaient atteindre jusqu’à 5% de la valeur de la production agricole des pays membres et que les autres puissances commerciales seraient soumises aux mêmes disciplines. Alors que l’accord prévoit la négociation d’une date limite pour éliminer les subventions aux exportations agricoles, M. Fischler a estimé que le document offre « un véritable parallélisme » avec les autres formes de concurrence à l’exportation utilisées par les autres pays. « Ce n’est pas un désarmement unilatéral », a-t-il déclaré. Pour sa part, le directeur général de l’OMC, Supachai Panitchpakdi, s’est félicité de l’accord conclu en déclarant qu’il constitue un petit triomphe pour l’institution multilatérale lors d’un point de presse, après la décision des 147 pays membres de donner un cadre aux négociations du cycle lancé à Doha (Qatar) fin 2001. « Le jour où nous conclurons le cycle de Doha sera un triomphe majeur », a-t-il ajouté. « C’est un moment historique pour notre organisation », a lancé M. Supachai.

Le patron de l’OMC a souligné les conséquences positives de l’accord pour les populations les plus pauvres de la planète. « Les agriculteurs auront plus de débouchés pour leurs produits sur les marchés internationaux. Avec l’élimination des subventions aux exportations, leurs bénéfices seront plus élevés », a-t-il ajouté. L’accord sur l’ouverture des barrières douanières aux importations de produits industriels « créera des emplois », a ajouté M. Supachai, tandis que les négociations sur les services se traduiront, selon lui, par des investissements dans les pays en développement. Quant au représentant américain au Commerce, Robert Zoellick, il a estimé que les 147 pays membres de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) ont « remis les négociations commerciales multilatérales sur les rails » après la conclusion de l’accord. « L’accord conclu est un pas décisif pour le commerce mondial. Après le détour de Cancun, la dernière conférence ministérielle, qui s’était soldée par un échec en septembre 2003, nous avons remis les négociations à l’OMC sur les rails », a-t-il déclaré lors d’une conférence de presse.

Le multilatéralisme remis sur les rails
« Nous avons sorti une carte indiquant la route à suivre. Bientôt, nous négocierons les limites de vitesse disant comment et à quel rythme nous abaisserons les barrières douanières », a-t-il ajouté. « Il y a encore beaucoup à faire, mais cet accord-cadre est un jalon », a-t-il estimé. « Nous nous sommes mis d’accord pour mettre en place une réforme historique dans le commerce agricole mondial. Nous avons tracé le chemin pour ouvrir les marchés pour les produits industriels », a-t-il expliqué à propos de l’accord. « Nous avons convenu d’intensifier les négociations pour ouvrir les marchés des services, qui représentent aujourd’hui plus de la moitié des économies de la plupart des pays. Et nous avons lancé des négociations pour simplifier les procédures qui permettront de réduire les coûts de vente de 15% dans certains pays », a-t-il ajouté. M. Zoellick a enfin rendu hommage aux négociateurs, de son « ami » européen Pascal Lamy aux ministres des pays en développement, en soulignant notamment le « rôle clé » du ministre brésilien des Affaires étrangères, Celso Amorim, dans les négociations qui ont permis l’accord-cadre conclu hier à Genève.

Source : La Tribune