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La Banque d’Algérie s’explique sur le scandale Khalifa Bank

jeudi 11 novembre 2004, par nassim

La Banque d’Algérie se défend d’être un des facteurs stimulateurs de la fraude dans ce qui est communément désigné, depuis un an et demi, de scandale financier du siècle en Algérie, à comprendre celui de Khalifa Bank.

Si la banque de Rafik Abdelmoumène Khalifa a pu mener ses affaires sans qu’elle soit inquiétée, explique le rapport de conjoncture pour 2003 de la Banque d’Algérie, c’est parce que la banque des banques a été « handicapée » pendant des années. En effet, est-il mentionné dans le même rapport, « la Banque d’Algérie et la commission bancaire ont été quelque peu handicapées dans l’exercice de leur mission de contrôle et de supervision du fait de l’absence d’arrêté et d’adoption des comptes annuels des exercices 1999, 2000 et 2001 par les organes sociaux de la banque (conseil d’administration et assemblée générale) et des rapports de certification des commissaires aux comptes »
L’inexistence de ces documents, soutient la BA, n’est pas aussi à mettre sur le compte d’une défaillance des services de la banque centrale. « El-Khalifa Bank a obtenu, par voie de justice, des reports successifs de la tenue des assemblées générales devant statuer sur les comptes sociaux ».

En effet, ce n’est là qu’un usage abusif du code de commerce de la part de Khalifa auprès de la justice qui, en se référant probablement à l’article 676, donnait droit au report de ses assemblées générales. Sur ce même sujet, le rapport revient sur les manquements répétitifs constatés au sein de cet établissement. Dès 2001, la BA aurait pu réagir puisqu’elle avait constaté des insuffisances managériales réelles, caractérisées par des faiblesses, tant pour l’organisation que pour l’encadrement, ainsi que celles liées au respect des procédures comptables et de reporting.
Ces constatations, opérées sur place et après contrôle régulier, avaient amené la Banque d’Algérie à « interpeller et rappeler à l’ordre El-Khalifa Bank quant au gonflement anormal du poste « divers » à l’actif et au passif de son bilan susceptible d’« occulter » l’origine des dépôts et la politique réelle de crédit engagée par la banque, « maquillant » des crédits irréguliers à des sociétés apparentées qui sont sévèrement réglementés et limités » (fin de citation).

Des infractions suffisamment graves qui auraient dû inciter la banque gouvernée par Laksaci à prendre des mesures autrement plus sévères que celles qui ont consisté à les porter à la connaissance des dirigeants d’El-Khalifa Bank, au incompétents demeurant, si l’on se réfère au même document. Une seconde mission de contrôle, envoyée au second semestre de l’année 2002, confirmera les conclusions de sa précédente. En novembre 2002, une suspension des transferts à titre conservatoire est décidée.
Ce n’est qu’à partir de ce moment que la machine de la BA s’est mise en marche. En fait, la poursuite des opérations de contrôle, en ce qui se rapporte aux opérations de commerce extérieur, repérera « l’existence d’irrégularités susceptibles de sanctions pénales d’une ampleur significative et qui ont donné lieu à l’établissement de plusieurs procès-verbaux, tel que prévu par l’ordonnance 96-22 ».

Un élément déterminant a précipité l’emballement de cette affaire. La banque des banques explique que « la rétractation en février 2003 des commissaires aux comptes d’El-Khalifa Bank qui avaient dans un premier temps certifié, en décembre 2002, les comptes sociaux de l’exercice 2000, a confirmé les appréhensions de la commission bancaire ». La suite est connue avec la nomination d’un administrateur provisoire, suivie de la constatation de la situation de cessation de paiement, après que les actionnaires n’eurent pas répondu à l’appel lancé pour la recapitalisation de la banque. Sur ce dernier point, la Banque d’Algérie n’apporte pas de réponse à la proposition française de reprendre la banque et d’effectuer un audit général. En mai 2003, l’agrément est retiré.
Par ces éclaircissements, la Banque d’Algérie, même si le rapport date d’avril 2004, se démarque du prédécesseur de M. Mohamed Laksaci, M. Abdelwahab Keramane, en exercice, lors de la constitution d’El-Khalifa Bank. Le 6 septembre dernier, est-il utile de rappeler, M. Abdelwahab Keramane, a été inculpé dans l’affaire, portant le numéro 99-03, concernant Khalifa Bank.

Selon des sources judiciaires reprises par la presse, l’instruction du dossier se fera conformément à l’article 69 du code de procédure pénale, alors que les chefs d’accusation portés à l’encontre de Keramane concernent la corruption, le trafic d’influence, l’abus de confiance, constitution de groupe de malfaiteurs, participation à escroquerie et dissimulation. Au mois d’octobre, c’était au tour des commissaires aux comptes de se voir notifier leurs inculpations. Il a été retenu contre Lakhdar Mimi et Hamid Sekhara l’infraction au code de commerce. Ce que confirme le rapport de conjoncture de la banque d’Algérie, confirmant la rétractation de l’un d’eux sur les certifications qu’ils auraient validées dans un premier temps.

Par M. Zentar, www.lanouvellerepublique.com