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M. Nicolas Sarkis : “Les prix pourront atteindre 50 dollars le baril”

jeudi 12 août 2004, par Hassiba

La situation actuelle du marché pétrolier, la hausse des prix du pétrole et le rôle de l’Organisation des pays exportateurs du pétrole (OPEP) ont été les principales questions abordées par M. Sarkis, expert pétrolier et directeur de la revue spécialisée Pétrole et Gaz Arabes dans cet entretien.

Liberté : Comment expliquez-vous la flambée actuelle des prix du pétrole sur les marchés internationaux ?
M. Nicolas Sarkis : Tout ce qui se passe, actuellement, sur le marché pétrolier indique que toutes les conditions sont réunies pour une hausse des prix du pétrole. Cette hausse est due essentiellement à des facteurs conjoncturels et structurels. Les premiers sont liés principalement à la baisse du taux de raffinage aux USA et en Europe, la situation géopolitique au Moyen-Orient qui est caractérisée par les attentats terroristes en Arabie Saoudite et le sabotage des oléoducs en Irak, la grève des travailleurs du secteur énergétique au Venezuela et la suspension des activités du géant russe Ioukos. L’ensemble de ces facteurs a poussé les prix à la hausse durant ces dernières semaines.

Il y a, néanmoins, des facteurs structurels qui pèsent lourdement sur le marché pétrolier. Il s’agit notamment de l’équilibre très serré entre l’offre et la demande du pétrole sur le marché international. Cette situation s’est amplifiée davantage par le fait que la majorité des pays membres de l’Organisation des pays exportateurs du pétrole (OPEP) ont atteint leurs capacités maximales de production. Ces pays ont procédé, rappelle-t-on, à plusieurs augmentations du quota de leur production sur le marché. Donc, il y a un déséquilibre entre l’offre et la demande mondiale du pétrole.

En effet, la demande croît, aujourd’hui, à un rythme très fort soit de 2,5 millions de barils/jour contre respectivement 1,7 million de barils/jour en 2003 et 0,3 million de barils/jour en 2002. Quant à l’offre, elle continue toujours d’évoluer en dents de scie puisque la quasi-totalité des pays exportateurs de pétrole ne peuvent plus augmenter encore une fois leurs productions.

Toutefois, les capacités de production non-utilisées des pays membres de l’OPEP ne dépassent pas 1,4 million de barils/jour. Ce qui constitue un pourcentage très infime comparativement au volume croissant de la demande mondiale. De ce fait, cette capacité non-utilisée devient très faible. Cette tendance haussière des prix est amplifiée, également, par les achats spéculatifs effectués sur le marché boursier international. Ces achats contribuent activement au mouvement de hausse des prix.

Est-ce que cela veut dire que les prix du pétrole vont encore continuer à augmenter ?
Le marché pétrolier se trouve, actuellement, sur un fil de rasoir car il suffit d’un événement pour augmenter les prix. Or, dans les conditions actuelles, le marché va vers la hausse des prix qui pourront atteindre la barre de 50 dollars ou plus. Cela dépend de l’évolution des facteurs conjoncturels. Mais, cette tendance haussière ne signifie pas que les prix vont augmenter, chaque jour que Dieu fait parce qu’ils pourront baisser suite à la baisse de la tension, par exemple, au Moyen-Orient.
Ceci étant dit, les raisons essentielles qui ont contribué à la hausse des prix du pétrole sont toujours là.

L’OPEP prévoit une réunion le 15 septembre prochain pour examiner la situation du marché pétrolier. Quel est votre commentaire ?
L’OPEP ne maîtrise plus la situation sur le marché pétrolier puisque son action sur le marché est très réduite.
Cette organisation a opté pour le mécanisme des prix de référence pour agir sur le marché. Or, ce mécanisme a démontré encore une fois ses limites.
Actuellement, les pays membres de l’OPEP ne peuvent pas influer sur le marché et faire face à une demande pétrolière mondiale de plus en plus croissante.
Donc, je ne pense pas que cette organisation puisse influer sur l’évolution des prix du pétrole.

Quelles sont les conséquences de la hausse des prix du pétrole sur l’économie algérienne ?
Cette hausse sera très bénéfique pour l’Algérie qui est un pays exportateur d’hydrocarbures. Elle se répercutera notamment par l’augmentation des revenus de ses exportations en hydrocarbures et de ses réserves de change.
Mais, cette hausse des prix aura des retombées essentiellement sur les prix du gaz naturel car les exportations de ce produit représentent une part importante.
Autrement dit, la hausse des prix du pétrole se traduira par une hausse des revenus des exportations du gaz algérien.

Par Faïçal Medjahed, Liberté