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Abou Djerra menacé de destitution

jeudi 5 mai 2005, par nassim

Le leader du parti islamiste MSP, Abou Djerra Soltani, serait la cible d’une procédure d’exclusion émanant des membres de la direction du parti qu’il préside.

En marge de la

Abou Djerra Soltani

rencontre sur la presse organisée, hier, par le MSP, plusieurs membres de la direction ont reconnu qu’une procédure d’exclusion du président de leur formation est en cours. Il est reproché à Abou Djerra Soltani d’avoir accepté le poste de ministre d’État sans avoir consulté ses collaborateurs et les instances du parti. Rififi et guerre de positions au MSP. Le parti islamiste siégeant au gouvernement est en proie à une grave crise politique sans précédent. La nomination de Abou Djerra Soltani au poste de ministre d’état continue à susciter des remous au sein de la formation qu’il préside depuis 2003, provoquant une levée de boucliers au niveau des instances dirigeantes du mouvement. Une motion demandant la tenue d’une session extraordinaire du madjliss echoura, signée par une soixantaine de membres sur les 250 qui composent cette structure, a été initiée au lendemain de l’annonce du remaniement ministériel par des cadres du parti pour débattre de la question.

Selon des sources proches des frondeurs, c’est au cours de cette réunion, qui aura lieu dans une dizaine de jours, que les membres du madjliss echoura procéderont au retrait de confiance à Abou Djerra Soltani, fraîchement désigné ministre d’état par le premier magistrat du pays. “Il nous suffit de 150 signatures pour tenir cette réunion et retirer la confiance au président du parti”, nous a confié, hier, une source proche de l’opposition qui a requis l’anonymat.

En marge de la rencontre organisée, hier, par le MSP au CIP et à laquelle a pris part Soltani, les cadres de son parti n’ont pas hésité à qualifier d’“humiliation infligée au MSP suite à la nomination de notre président au gouvernement”. Hadj Slimane, membre fondateur de l’ex-Hamas avec Nahnah et l’ancien ministre de l’industrie, Abdelmadjid Menasra, ont été les plus sollicités par les journalistes dans les coulisses. Les deux cadres dirigeants ont confirmé l’existence d’un malaise, voire d’une “fronde” dans les structures du parti. Ils accusent, par ailleurs, le premier responsable du MSP d’avoir “agi en solo et n’avoir pas consulté les instances dirigeantes”.

L’un des vice-présidents, Menasra, a déclaré que “le président du parti n’a pas réuni ni le bureau exécutif, ni le madjliss echoura, ni d’ailleurs la commission des cinq pour débattre des propositions et des éventuelles nominations”. Et d’ajouter que “en tant que porte- parole de notre parti, il est inacceptable qu’il siège dans l’exécutif parce qu’il ne pourra plus ni voyager ni faire de déclarations. Il est tenu par l’obligation de réserve”. Pour étayer et renforcer son argumentaire et se faire plus convaincant, l’ex-bras droit de Nahnah dira : “Il n’est pas dans les traditions de notre formation qu’un président du HMS siège dans le gouvernement.”

Des cadres présents, hier, au CIP sont allés jusqu’à rappeler pour qui veut les entendre que l’ancien chef du MSP a refusé d’intégrer le gouvernement à plusieurs reprises et avait décliné des offres beaucoup plus importantes que celle que leur responsable actuel a acceptée.

Menasra, qui refuse de donner des détails sur le plan préparé et sur la suite des évènements au sein de la formation islamiste - estimant que c’est aux membres du madjliss echoura de débattre et trancher les solutions à apporter - s’interdit de qualifier le mouvement de redressement.

Néanmoins, il reconnaît que des corrections seront “administrées” au cours de la session de l’instance suprême entre les deux congrès qui aura lieu le 15 juin prochain, soit à quatre jours de la célébration du deuxième anniversaire de la mort du “père spirituel” du mouvement, Mahfoud Nahnah, décédé le 19 juin 2003. “Pourquoi attendre un mois pour demander des explications au président du parti”, ont demandé les journalistes aux différents responsables qui mènent l’opposition. “Rien ne presse, et on a tout le temps pour agir”, a répondu Menasra pour qui l’essentiel est de “régler le problème dans le respect des statuts du parti et par ses structures”.

Même son de cloche chez le premier vice-président, Fateh Saïdi. Arrivé en retard sur les lieux de la rencontre, le proche collaborateur de Abou Djerra Soltani a déclaré à la presse : “il nous a mis devant le fait accompli, moi en tant que vice-président et membre de la commission des cinq, j’ai été informé par Soltani de sa nomination le jour même du remaniement.” Il abonde dans le même sens que ses collègues du bureau exécutif, et s’est joint au mouvement qu’ils ont initié. Le grand absent à la rencontre d’hier est incontestablement le très médiatique député Abderazak Mokri que des sources proches des frondeurs donnent comme successeur à Abou Djerra Soltani.

Se tenant loin de la polémique engagée actuellement, l’ancien président de groupe parlementaire bénéficie d’un consensus des différents courants qui traversent la formation islamiste.
Le temps est aux “conclaves”, manœuvres et “tirs croisés” en attendant la prochaine session du madjliss echoura qui promet d’être “houleuse”.

Soltani : “le MSP est comme une caserne”
Dans son intervention, hier, au CIP, le président du MSP et néanmoins ministre d’état s’est permis de donner des leçons à la presse écrite, notamment qui est loin d’être professionnelle selon lui. Parlant de son parti, Soltani lâchera une phrase lourde de signification : “Au MSP, on est connu pour être une caserne. Une caserne a ses règles et nous sommes connus pour la discipline”. Le chef du parti islamiste a maintes fois fait appel au jargon militaire pour étayer ses propos. Cette phrase sonne comme une réponse, mais aussi une mise en garde sérieuse à ses adversaires qui mènent la fronde ces dernières quarante-huit heures et qui étaient, d’ailleurs, en grand nombre dans la salle.

Par Mourad Aït Oufella, liberte-algerie.com