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Algérie-France : « la guerre des mémoires »

vendredi 23 décembre 2005, par Samir

Le traité d’amitié entre l’Algérie et la France mais aussi la controverse née de la loi de février 2005, sont au menu du documentaire « Loi de février 2005 - La guerre des mémoires » de Ali Fateh Ayadi qui a été diffusé sur « Canal Algérie ».

Quel avenir pour le traité d’amitié entre l’Algérie et la France ?

Construit d’une manière tout à fait efficace, autour de prises de postions d’historiens à l’autorité établie, le documentaire trouve aussi son rythme, d’une part dans la qualité du montage qui articule avec rigueur les enchaînements entre les différents intervenants et la gradation des thèmes abordés auxquels les inserts de documents d’actualité -une séance de l’Assemblée nationale française- ou d’époque, ajoutent une profondeur pédagogique. Le spectateur algérien avait ainsi la possibilité d’entrer en quelque sorte dans le coeur d’une polémique qui, pour être essentiellement menée en France, n’en n’affecte pas moins autant le passé de l’Algérie que ses relations futures avec l’ancienne puissance coloniale.

S’il paraît vite évident que les historiens français ont pu être, en raison même des traditions républicaines établies, heurtés par l’injonction de l’article 4 à enseigner « le caractère positif de la colonisation, notamment en Afrique du Nord » -injonction qui fut aussi le principe de la pétition lancée par Claude Liauzu et Gilbert Meynier-, ce sont aussi, au-delà de l’enjeu de la liberté d’enseigner et du refus d’une histoire officielle, les mensonges d’Etat sur ce que fut la colonisation qui sont explicitement stigmatisés par les différents auteurs interrogés par Ali Fateh Ayadi. « Les enfumades, les razzias, le comportement des armées françaises en Algérie au moment de l’occupation étaient tout à fait connus à Paris », estime, à titre d’exemple, Olivier Le cour De Grandmaison, auteur d’un remarquable ouvrage sur l’extermination coloniale, récemment présenté au Salon international du livre d’Alger.

Si le travail de lobbying des nostalgiques de l’Algérie française est dûment relevé par les intervenants -« cinquante ans plus tard, il s’en trouve encore qui contestent l’indépendance de l’Algérie et son Etat », note, à ce sujet, Benjamin Stora-, est-ce fondamentalement l’appréciation « positive » de la colonisation qui est clairement réfutée ? « La question est celle du rôle positif ou négatif de la colonisation », se demande, pour sa part, Mohamed Harbi qui rappelle que « ce qui était construit l’était au bénéfice de la France et des Français, avec l’argent et la sueur des Algériens ». Cette appréciation est, de fait, insultante pour les nationalistes algériens et Stora lui oppose, de manière très didactique, la puissance des mouvements de révolte dans les colonies.

En filigrane, le documentaire rend perceptible le poids des calculs électoraux et en particulier une manière de cohérence dans le souci des responsables français de ressourcer une image entamée de la France dans les gloires revisitées de l’Empire. Gilbert Meynier dira, avec des mots simples et forts, en quoi l’actuel débat, n’en déplaise au secrétaire d’Etat français aux Anciens combattants -ancien officier de l’armée française d’origine algérienne- ne peut que concerner les Algériens et surtout ne pas laisser indifférentes, comme le relève Benjamin Stora, les nouvelles générations de Français -nés et ayant grandi en France- qui revendiquent autant « la citoyenneté française que la mémoire des grands-pères militants de la cause nationale algérienne ».

Synthèse de Samir
D’après la Tribune