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Ali Benflis et Abdelaziz Bouteflika à Béjaïa

lundi 29 mars 2004, par Hassiba

La deuxième semaine de la campagne électorale sera marquée, aujourd’hui à Béjaïa, par la venue d’Ali Benflis et d’Abdelaziz Bouteflika au chef-lieu de la wilaya où des meetings sont programmés.

En effet, après Saïd Sadi, Fawzi Rebaïne et Saâd Djaballah, ce lundi, c’est au tour d’Ali Benflis et Abdelaziz Bouteflika qui feront leur entrée électorale dans la capitale des Hammadites. Ces deux visites se dérouleront en fait sous une extrême tension puisque le candidat le plus impopulaire dans la région tentera de faire campagne pour un second mandat parmi une population qui n’a toujours pas oublié les évènements sanglants du Printemps noir.

Le meeting du président-candidat, qui était annoncé initialement pour le mercredi prochain, sera organisé finalement aujourd’hui à 9 h à la salle Bleue jouxtant le siège de la wilaya, prenant ainsi de court les aârouch. Déjà hier, des barrages de la gendarmerie sont dressés dans les principaux accès au chef-lieu de la wilaya. Nous avons appris également de sources fiables que des renforts des services de sécurité ont été dépêchés à Béjaïa pour assurer le bon déroulement du rassemblement électoral de Bouteflika.

Benflis, quant à lui, animera un rassemblement à la salle Amirouche, dans l’après-midi de ce lundi.
L’interwilayas, qui s’est réunie dans la nuit de samedi à dimanche dernier à Akfadou, est sortie avec une déclaration dans laquelle les délégués ont appelé les citoyens à organiser des rassemblements pour contrer la visite du président-candidat.

Pourquoi les aârouch ont décidé spécialement de perturber l’activité électorale de Bouteflika ? Les délégués du mouvement citoyen sont unanimes : Bouteflika est responsable de la mort de plus d’une centaine de citoyens. Farès Oujeddi nous a déclaré que tous les candidats à la magistrature suprême du pays ont été dénoncés par les aârouch. Mais, expliquera-t-il, Bouteflika est interdit en Kabylie parce que depuis son intronisation en 1999 au pouvoir, il n’a jamais cessé d’insulter la population et de la provoquer. « La plate-forme d’El Kseur est née sous le règne de Bouteflika et c’est lui qui a refusé de prendre en charge les revendications citoyennes en laissant mourir des jeunes sous les balles assassines des gendarmes », ajoutera le délégué d’Akfadou.

Pour Khoudir Benouaret, délégué d’Amizour, le président-candidat doit reprendre l’avion pour rentrer d’où il est venu. « Abdelaziz Bouteflika a refusé de recevoir plus de un million de citoyens qui sont allés le 14 juin 2001 lui présenter une plate-forme d’El Kseur. Il a réprimé la marche historique d’Alger et fermé le portail du siège d’El Mouradia. Aujourd’hui, nous lui disons que l’Algérie est à ses enfants et qu’il doit partir », ajoutera notre interlocuteur. Zahir Benkhellat estime, quant à lui, que « les citoyens n’ont pas oublié que Bouteflika a ameuté ses troupes contre le peuple en réprimant sauvagement toute protestation citoyenne et libéré les terroristes et les égorgeurs d’enfants ». « Nous allons l’accueillir de la même façon qu’en 1999 », tranchera le délégué d’Akbou. Pour rappel, le président-candidat, qui a sillonné presque la quasi- totalité des wilayas du pays en distribuant des sommes d’argent en préparation de sa campagne électorale, n’a pas pu mettre les pieds en Kabylie.

Depuis son accession au palais d’El Mouradia en 1999, Bouteflika a, à maintes reprises, annoncé ses visites à Béjaïa et Tizi Ouzou mais celles-ci sont à chaque fois reportées en raison du refus de la population de le recevoir. En 1999, alors qu’il était en campagne à Béjaïa, des centaines de citoyens l’ont accueilli spontanément avec des jets de pierres et des slogans hostiles à sa personne. C’est à cette occasion qu’il a lâché la fameuse « insulte » en direction de la population de Béjaïa : « je vous croyais des géants, je vous ai découverts des nains. » Depuis l’été dernier, le chef du gouvernement tentait de trouver une sortie à la crise qui a fait de Bouteflika le personnage honni par les citoyens en engageant un dialogue avec les aârouch.

En refusant d’officialiser la langue amazigh et en proposant le référendum comme solution à cette revendication si chère à la région, le divorce entre le pouvoir et les aârouch est définitivement consommé.

Mourad Bektache, Le Matin