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Ce qu’attend le FIS dissous d’Abdelaziz Bouteflika

mardi 13 avril 2004, par Hassiba

Les islamistes sont sur le qui-vive. Ils sont en attente d’une concrétisation rapide de la réconciliation nationale et le font savoir de manière empressée à Abdelaziz Bouteflika avant même la proclamation officielle des résultats par le Conseil constitutionnel et la prestation de serment du président réélu, en lui faisant parvenir deux messages clairs en moins de vingt-quatre heures.

Le premier émane de la direction historique du FIS qui a publié un communiqué très éloquent en la matière dimanche soir. Le second, rendu public, hier matin, parvient d’Allemagne où est établi le représentant de la délégation exécutive du parti dissous à l’étranger. Et dans les deux textes transparaît une satisfaction totale des résultats d’une élection dans laquelle ils avaient d’ailleurs misé sur le vainqueur.

Rabah Kébir n’a d’ailleurs pas manqué d’adresser ses félicitations au président Bouteflika pour sa réélection à « une majorité écrasante au cours d’élections propres et libres ». Selon Rabah Kébir, le résultat ne souffre d’aucun doute puisqu’il exprime, selon lui, « la volonté et la soif du peuple de concrétiser la réconciliation nationale totale et sortir définitivement (l’Algérie) de la crise ».

« Elle traduit également la confiance du peuple qui vous considère comme l’homme de la situation et de la réconciliation nationale totale que vous avez défendue avec force et conviction », a-t-il ajouté. Une manière explicite de lui rappeler les raisons pour lesquelles il avait appelé les Algériens à voter en sa faveur quelques jours avant le scrutin. Ce que lui rappelle également la direction du FIS dissous dans son communiqué, mais en d’autres termes puisqu’elle s’interroge quant à elle sur les capacités du président réélu de « concrétiser la réconciliation nationale en dépit des pressions et des empêchements ».

Le document signé par Abassi Madani, Abdelkader Boukhemkhem, Kamel Guemmazi, Omar Abdelkader et Mourad Dhina, tient, d’autre part, à préciser que l’absence de la signature de Ali Benhadj est uniquement due à l’interdiction qui lui est faite de prendre part à la vie politique. Autrement dit, le communiqué en question bénéficie de son soutien total d’autant qu’il s’attelle à rendre public ce qu’ils attendent de Bouteflika.

La réconciliation nationale se résume en trois points selon eux :

 Le premier consiste à « régler la situation des victimes de la crise nationale ». La liste des victimes est spécifiée : il s’agit des disparus, des prisonniers, des personnes privées de leurs biens ou empêchés de rentrer au pays et, enfin, ceux privés de leurs droits civiques et politiques. Selon eux, il s’agit par conséquent d’éliminer les poursuites judiciaires à l’encontre des personnes condamnées à mort, comme Rabah Kébir, réhabiliter Ali Benhadj dans tous ses droits, octroyer aux disparus le statut de victimes au même titre que les personnes assassinées par les terroristes.
Le FIS ne donne aucune précision au sujet des prisonniers, ce qui peut laisser entendre que l’allusion concerne les terroristes et leurs soutiens du moment que tous les prisonniers politiques ont été libérés. Et ce n’est pas tout.
 Dans le second point, le parti dissous exige la levée de l’état d’urgence.
 Et en troisième lieu, l’organisation d’une conférence nationale à laquelle participeraient toutes les parties, y compris le FIS.

Le parti dissous informe enfin Bouteflika de sa disponibilité à lui prêter main forte dans la réalisation de ce projet en déclarant qu’il prendra « la position adéquate pour la réussite de toutes les initiatives positives allant dans ce sens ».

On l’aura compris, l’empressement des islamistes à rappeler au président de la république ses engagements quelques jours à peine après sa réélection vise manifestement à intensifier les pressions en vue d’une concrétisation rapide du projet de réconciliation nationale. Cette position confirme par ailleurs, et surtout, que Bouteflika incarne, aujourd’hui, bel et bien le représentant de la mouvance islamiste qui n’a d’ailleurs pas manqué de se manifester tout au long de la période électorale. La présence d’anciens « émirs » dans ses meetings et le travail de sensibilisation mené en sa faveur durant la campagne électorale est loin d’être passé inaperçu puisque d’anciens chefs terroristes, comme Madani Mezrag, sont même allés jusqu’à proclamer publiquement leur soutien au président-candidat.

Abla Chérif, Le Matin