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L’Akfadou (Béjaïa) à la recherche de solution

mardi 12 avril 2005, par Salim

La déforestation à Béjaïa est un phénomène qui porte dans ses différents aspects un sérieux coup au patrimoine forestier de la wilaya qui s’étend sur une superficie de 122 500 ha de forêts et de maquis. Entre les incendies et les coupes illicites, la forêt subit une destruction par essentiellement l’élément humain.

Le mal des coupes illégales est subi dans des proportions qui ont fait de la forêt domaniale d’Akfadou, située à cheval entre les deux wilayas de Tizi Ouzou et Béjaïa et l’un des principaux massifs forestiers de cette dernière (5400 ha), un souffre-douleur sous les lames des haches et les vrombissements destructeurs des tronçonneuses.

Des pieds droits, des manches, des stères de liège, de bois de chauffage, d’industrie ou d’œuvre sortent illicitement de cette forêt, dont la gestion est de la compétence territoriale de la circonscription d’Adekar à laquelle se rattachent aussi les forêts de Beni Ksila et Sidi Aïch. Pistes barrées, d’autres carrément creusées, pilleurs menaçants..., la forêt réserve souvent de mauvaises surprises aux brigades forestières. Non armées, elles s’y introduisent quelquefois sous l’escorte des patriotes pour les besoins de leurs tournées de surveillance. « Faire un barrage à 2 h avec les mains nues, il est évident que c’est un risque que nous prenons », nous dit Abdelkrim Ahmed, chef de service à la circonscription des forêts de Béjaïa. La présence des patriotes n’est pas automatique. Des embuscades ont été tendues à des pilleurs, « armés » de haches de bûcheron, et pris souvent en flagrant délit d’abattage d’arbres ou d’écoulement des produits provenant des coupes. Les perches servant de pieds droits dans les travaux de bâtiment et dont le prix officiel est de 50 DA se vendent jusqu’à 200 DA la pièce.

La circonscription des forêts de Béjaïa a saisi durant l’année 2004, outre 3000 manches pour pelles et pioches et 132 q de liège, 800 perches qui allaient alimenter le marché parallèle. Le chêne zen de Tiniri, d’Azrou n’Tgarfa ou autres cantons d’Akfadou et d’ailleurs, avec lequel sont fabriquées ces perches, fait l’affaire du marché informel qui se « nourrit » aussi d’écorce du chêne-liège. Le liège dont l’exploitation obéit à une réglementation suscite des convoitises dans la région. Des exploitants clandestins sont tombés dans les filets des forestiers et des quantités de liège ont été récupérées et proposées à la vente à l’Entreprise nationale du liège, l’unité de Béjaïa, qui en fait sa principale matière première. Avec près de 42 000 ha, dont près d’un quart seulement est considéré en bon état, le chêne-liège est l’espèce dominante sur le territoire de la wilaya. 175 procès-verbaux ont été dressés contre des pilleurs. 42 seulement ont abouti à des condamnations de versement d’amendes.
Les délits concernent aussi les occupations et constructions illicites, dont 48 cas enregistrés l’année dernière. Le phénomène qui touche essentiellement les zones de Beni Slimane et Souk El Tenine trouve son compte dans le problème d’exécution des jugements de la justice. A la circonscription, on nous dira : « On n’a pas les moyens de détruire ces constructions. »

Autre aspect de la déforestation : les incendies de forêt qui ont ravagé 2030 ha, dont près de 500 ha de forêt, suite à 198 foyers déclarés, notamment dans la forêt de chêne-liège de Taourirt Ighil (Adekar) et dans la région Tichy-Béjaïa. Quelles solutions pour la déforestation du fait des coupes illicites ? En attendant le classement de la forêt d’Akfadou parc national, supposant donc une meilleure dotation en moyens (projet finalisé par la Direction générale des forêts et soumis au gouvernement), les forestiers se munissent dans leur chasse aux pilleurs de la loi forestière et d’une somme de dispositions pensées dans l’objectif de « limiter les dégâts ». Du bois de feu mort est donné gratuitement aux riverains qui en formulent la demande pour une quantité qui ne dépasse pas les besoins domestiques.

Pour les besoins des exploitants forestiers, l’administration applique un tarif de cession « préférentiel » autant pour ces différentes variétés de bois que pour les menus produits comme les pierres, les plantes médicinales et la souche de bruyère. En 2004, 966 perches et 461 m3 de pierre, entre autres produits, ont été vendus. Appliquée il y a plus d’une année aux riverains de la forêt d’Akfadou, la gratuité du bois de feu est généralisée depuis un peu plus d’un mois. Plus de 200 parcelles de terre au total ont été données en amodiation, alors que 21 projets de proximité approuvés au profit de plusieurs villages de la région sont en cours de réalisation selon la circonscription des forêts. Autant de solutions mises en œuvre par les pouvoirs publics, mais qui peinent à arracher la forêt des griffes de ses destructeurs bien que les dégâts soient loin d’égaler ceux subis durant les événements de Kabylie. Le phénomène, particulièrement accentué en ces temps de froid pour le bois de chauffage dans plusieurs endroits de la région, persiste. Comme se cramponne aux arbres la mafia du bois.

Par K. Mejdoub, elwatan.com