Accueil > ALGERIE > La prostitution en Algérie : Causes et effets sur la société (2e partie et fin)

La prostitution en Algérie : Causes et effets sur la société (2e partie et fin)

dimanche 9 mai 2004, par Hassiba

De nos jours, bien souvent, les personnes rentrent dans le milieu de la prostitution afin de survivre et non par projet de vie.

La prostitution peut être occasionnelle comme, par exemple, celles qui se prostituent pour avoir de l’argent à chaque fin de mois. Il existe différents facteurs qui peuvent faire en sorte qu’une personne entre dans le milieu de la prostitution :
 la rencontre de quelqu’un qui connaît le milieu, comme par exemple une mère, une amie ;
 la rencontre d’un proxénète qui peut se dissimiler derrière une relation amoureuse ;
 les offres d’emplois déguisées (clubs et salons de massage...).
Les causes de la prostitution sont multiples :
 Facteurs sociaux et psychologiques : la violence familiale, les sentiments de rejet, d’abandon, d’injustice, vécus dans l’enfance.
 Les abus sexuels : ces viols ou incestes donnent naissance à une dévalorisation de soi, une culpabilité, ce qui peut engendrer la marchandise de son corps.
 Facteurs économiques : la pauvreté est souvent à l’origine de l’utilisation de son corps. Dans ce cas-ci nous pouvons parler de prostitution choisie pour un but lucratif.
Elle peut être due au manque de qualifications, à un éclatement de la famille, un manque de revenus, des dettes, etc.
 Toxicomanie : le fait de consommer de la drogue implique une dépense d’argent parfois très conséquente. Certaines consomment de la drogue pour surmonter les conditions de travail. Par contre, d’autres femmes se prostituent pour se procurer de la drogue.
 L’appât du gain : le fait se de se prostituer est un moyen « facile » de se procurer de l’argent. La société d’ailleurs nous incite à consommer. La publicité suscite toujours le désir de plus de biens.
 Les réseaux internationaux.

A la lumière de notre enquête ayant porté sur ce sujet, il apparaît qu’il existe trois types de prostituées.
La première catégorie forme la majorité des cas, elle concerne celles qui offrent leur corps par nécessité, la seconde catégorie, non des moindres, par vengeance et enfin le reste, une minorité, qui cherche le plaisir sexuel.
Pour ce qui est de la première catégorie, nos différents entretiens avec « ces filles de joie » nous ont permis de constater que la plupart d’entre-elles proviennent d’un milieu social dont la pauvreté a été l’élément clé de leur dépravation. Les autres, des filles-mères, ont subitement quitté le domicile familial de peur de subir le châtiment suprême, la mort ou le reniement à vie. Par ailleurs, le terrorisme a été l’un des facteurs de propagation de la prostitution lorsque la victime arrive à s’échapper et/ou se faire libérer par les services de sécurité lors d’un ratissage.

Dans la majorité des cas et quand bien même cette fille est reprise par sa famille il n’en demeure pas moins qu’elle sera toujours considérée comme une damnée surtout si elle est enceinte.

Les différentes filles qu’on a eu l’occasion d’approcher et dont l’âge varie entre 16 et 30 ans forment le plus gros des troupes. Elles sont faciles à repérer avec leur tenue légère et provocante en plus d’un maquillage parfois outrageant. Le plus souvent elles se regroupent par deux, voire trois dans un bar ou un restaurant pour débusquer le pigeon plein aux as qui paiera l’addition et quelques minutes de plaisir parfois à un prix fort.
C’est au cours d’un repas que ce traite l’affaire et si le client est satisfait du prix proposé par sa nouvelle compagne, ils se dirigent tous deux vers un hôtel que connaît la jeune femme et qui puis est de connivence avec le patron de l’établissement moyennant un bakchich supplémentaire. Il arrive fréquemment que la même chambre est louée cinq fois, voire dix durant le week-end et la saison estivale. Des établissements de renom s’adonnent à cette pratique lucrative à bien des égards compte tenu que ces établissements hôteliers sont pratiquement vides pendant la basse saison.

La plupart de ces hôtels reconnaissent, il est vrai, que ce type de commerce pourtant illicite couvre le déficit engrangé vu le manque de clients potentiels. Les uns admettent le plus normalement qu’ils louent des chambres à des couples de passage sans leur demander des papiers du moment que ces amants d’un jour ne passent pas de nuit.
Dans les villes de l’intérieur, à défaut de trouver un hôtel pour abriter un couple il s’agit de dénicher une « maison de rendez-vous » où l’on pourrait trouver une femme à sa guise en mettant le paquet. Pour y parvenir, avec un peu de chance, il faut connaître des contacts susceptibles de vous y introduire sans attirer l’attention car ce genre de « maison » est étroitement surveillée par la police des mœurs mais aussi « les fous de Dieu » qui, rappelons-le, ont massacré des femmes aux mœurs légères à Ouargla, il y a de cela deux années. Ainsi ne serait-il pas judicieux de recourir à nos bons anciens lupanars (maisons closes) afin d’éviter les multiples problèmes que génère la prostitution.

En effet, il fut un temps où les jeunes et moins jeunes allaient dans ces « boîtes » pour trouver en l’espace de quelques minutes un plaisir charnel qui est interdit hors mariage.

Les pensionnaires de ces lieux étaient astreintes à des visites médicales très sérieuses deux fois par semaine et ne pouvaient quitter leur « travail » qu’après l’obtention d’une permission délivrée par la police pour rendre visite à leurs parents.

Ainsi non seulement le client est protégé du point de vue sanitaire mais également il va dans un endroit fait à cet effet, par conséquent autorisé. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas et combien de personnes ont été atteintes de maladies sexuellement transmissibles (MST) que l’on nomme à plus forte raison chez nous les maladies de la honte. Comment arriver à dépister le sida dans de pareilles situations ? Est-ce une honte de plaider pour la réouverture des maisons closes ? Ces maisons de tolérance permettent un contrôle régulier et ont été de tout temps protégées par la loi car elles sont créées dans un cadre réglementaire.

Pourquoi jouer sur les sensibilités religieuses et/ou sociales pour éviter de parler concrètement de ce fléau qui risque à moyen terme de contaminer les pensées les plus velléitaires pour constater ensuite le drame. Nul n’est prophète en son pays, alors avec un minimum de rigueur et de compréhension, il faut parler de cette question avec franchise car il y va de la santé du citoyen. Certes, il faut beaucoup de courage et de persévérance pour aborder un sujet aussi sensible que la prostitution mais parfois la nécessité fait force de loi quand il s’agit de préserver la santé de la population.

Comme on a pu le constater, malgré les interdictions de toutes sortes, la prostitution a traversé les époques, jusqu’à devenir aujourd’hui encore plus difficile à enrayer, avec notamment le flux migratoire des frontières de l’extrême sud algérien.

Dans l’histoire, on a vu que si certains se sont bien sûr enrichis sur le dos de la pauvre prostituée, d’autres ont essayé de créer un minimum de règles pour protéger ses droits, tandis que certains ont aussi fait des efforts pour améliorer son sort en instituant des programmes pour les réhabiliter.

On constate toutefois une tendance récente à légaliser la prostitution « libre », à l’assimiler à un métier comme un autre, ouvrant les droits à la sécurité sociale, comme cela se passe en Europe. Cette position est fort discutée par les associations qui travaillent avec les prostituées.
Il est évident qu’il reste difficile d’être absolument sûr que la prostituée l’est de son plein gré et que ses gains lui restent en pleine propriété.

M. E.-O, La Nouvelle République