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Les jouissances de Zerhouni

jeudi 4 mars 2004, par nassim

Zerhouni se réjouit, exulte et lance la sentence : « Ce sera un journal en moins. » Il s’agit bien sûr de propos sadiques relatifs à la menace de fermeture du Matin. Voilà donc un ministre d’Etat, dont l’honorable fonction est régie par la Constitution qui encourage la liberté de la presse et la défense de celle-ci, qui l’insulte et la piétine sans état d’âme alors qu’il n’hésite pas lui-même à s’y référer.

Voilà également un ministre d’Etat dont le gouvernement est régi par les lois de la République qui se met au service d’un Président-candidat qui foule au pied les valeurs universelles du droit à l’information et transgresse toute règle de l’éthique qu’exige le statut de ministre d’Etat. Il aurait pu se contenter de disculper son département, comme il l’a fait. Mais il se plaît dans l’arrogance et l’insulte, l’irresponsabilité et la revanche.

Par ce propos « ce sera un journal en moins », le Pouvoir révèle toute la démesure et les inconséquences de son mode de gouvernance régi par les allégeances claniques et la répression contre toute voix qui dérange son règne du musellement, de la traque et des profits rentiers, éloigné de toute préoccupation du pays, encore moins du peuple. Ce propos indifférent et insultant pour toute la presse indépendante y compris étatique, car cette dernière ne peut rester seule désormais dans une Algérie des luttes, vient s’ajouter à celui revenchard d’un Zerhouni rattrapé par son passé de tortionnaire « Benchicou me le paiera ». Propos par lequel il confirme que le ministre d’Etat qu’il est agit en toute bonne conscience comme un mafiosi qui veut régler ses comptes en utilisant les moyens de l’Etat pour endiguer le scandale.

Loin de lui l’idée de recourir à la justice. « J’ai tout le temps pour le faire », dit-il. Toute proportion gardée, Zerhouni agit là à la manière du commandant nazi d’Auschwitz qui, sous des dehors insoupçonnables et irréprochables, un génie dans l’industrialisation de la mort massive, s’est révélé après le procès de Nuremberg l’ordonnateur des marées humaines envoyées dans les fours crématoires. Homme exemplaire, brave, d’une obéissance aveugle à l’Etat, le soir venu, il vérifiait le niveau de la « production des chambres à gaz ». Il traquait le four défaillant en toute sérénité. Voilà où en est arrivé l’Etat de Bouteflika au nom duquel agit en toute impunité Zerhouni, au nom du pouvoir fasciste de Bouteflika qui a fait de l’Algérie un terrain miné, un champ de discordes et il n’y a pas de parcelles de cette Algérie qui soit restée indemne des redresseurs de Bouteflika. Mais un tel règne, de tels propos d’un ministre d’Etat, qui est le premier à se dresser contre la Constitution et la République, finissent toujours sous les cris des insurgés.

Rachid Mokhtari, Le Matin