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Présidentielle : Tensions en Kabylie

dimanche 14 mars 2004, par Hassiba

A quelques jours seulement de l’ouverture officielle de la campagne électorale pour la présidentielle, le 8 avril, le climat politique est particulièrement délétère en Kabylie. Tout porte à croire, et sans vouloir anticiper sur les évènements, que les jours à venir risquent d’être chauds. D’abord, il y a les aârouch.

Une fois la décision de rejeter le prochain rendez-vous électoral prise, les délégués du mouvement ont entamé la campagne antivote en organisant de nombreuses sorties à travers quelques localités. Les actions pour le rejet sont appelées à passer à la vitesse supérieure dans les jours à venir. Pour les aârouch, « il est hors de question de tolérer une quelconque élection tant que la plate-forme d’El Kseur n’est pas satisfaite ».

Donc, le fait de s’opposer à cette consultation est une décision irrévocable pour le mouvement citoyen. De l’autre côté, il y a la participation du RCD aux élections, ce qui a changé la donne. Dans sa logique participative, le parti de Saïd Sadi se positionne aux antipodes du mouvement. Il décide ainsi de faire campagne dans un tel climat. C’est peut-être pour cela que le RCD a été « éconduit » jeudi passé à Timizart dans la wilaya de Tizi Ouzou.

En effet, la conférence-débat qui devait être animée, jeudi dernier à Souk El Had, par le
Dr Mouloud Lounouaci et Noredine Aït Hamouda a été empêchée. On a même frôlé l’affrontement. Suite à quoi, le bureau régional du parti de Saïd Sadi a rendu public un communiqué intitulé « nous ne resterons pas inactifs », dans lequel il a chargé les aârouch tout en mettant en exergue la complicité de l’Administration. « Une complicité de l’administration est donc sûre d’autant que le wali a demandé à l’APC de fermer ses portes avant midi », est-il écrit dans le même document. Le RCD relève dans son communiqué que cet empêchement intervient au moment où les ministres de Bouteflika se « réunissent tous les jours en Kabylie, à la Maison de la culture ».

Allusion faite au rassemblement de « magma » de redresseurs et autres comités de soutien au président-candidat qui s’est tenu le même jour à la maison de la culture. Ce qui s’est passé ce week-end à Souk El Had, et qui peut être considéré comme un signe avant-coureur de ce que nous réservent les jours à venir, ne semble en rien altérer la détermination du staff du RCD à poursuivre sa campagne. Toujours selon Lounouaci, que nous avons contacté hier à cet effet, cet incident provoqué par une « bande d’adolescents » n’est pas en mesure de nous dissuader. « On poursuivra nos sorties et tout se fera normalement », a-t-il indiqué. C’est-à-dire que le RCD compte poursuivre sa campagne. Mais il y a là de forts risques de dérapages, d’autant que la couleur a été déjà annoncée.

Ce qui s’est passé avec le RCD s’est également produit avec le FFS. Une autre conférence du parti d’Aït Ahmed a été empêchée à Tizi Rached, il y a une semaine. La population locale n’ayant pas encore « avalé » la participation du FFS aux élections locales - boycottées par le RCD - le 10 octobre 2002. Depuis, les élus issus de ces élections largement rejetées sont qualifiés « d’indus élus ».

C’est pourquoi d’ailleurs ces derniers, sortis d’urnes « fictives », ont été dans le collimateur des aârouch qui ont, depuis, demandé leur révocation pour avoir
« squatté la volonté populaire ». La dernière action en date allant dans le sens de les déloger remonte à mardi dernier dans la localité de Boghni. Ainsi donc, même si le parti d’Aït Ahmed, que les délégués du mouvement citoyen accusent d’être en « faillite structurelle et organique », a opté pour le boycott des prochaines joutes électorales, il reste que jusqu’à maintenant, plus particulièrement à Tizi Ouzou, ses sorties antivote ne sont pas les « bienvenues ».

A la lumière de la situation politique qui tend de plus en plus à s’emballer, et ce, à moins d’un mois du jour J, tout indique et tous les ingrédients sont réunis, que le printemps sera mouvementé.

Brahim Boubchir, Le Matin