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Scandale au CHU de Douéra

mardi 20 avril 2004, par Hassiba

Lors de la conférence de presse, tenue, hier, à la sûreté de la wilaya d’Alger, les officiers Bouaoudia, chef de la BMPG de Douéra, et Bentafet, chef de la PG de Draria, ont fait état du démantèlement d’une association de malfaiteurs, constituée de 21 personnes

Celles-ci ont été arrêtées et mises en examen dimanche dernier. Trois des accusés ont été mis sous mandat de dépôt et trois autres sont sous contrôle judiciaire, alors que six médecins et pharmaciens sont en liberté provisoire. Six autres inculpés, des agents de sécurité, ont comparu en citation directe. Les chefs d’inculpation sont : association de malfaiteurs, détournement de deniers publics, complicité et recel.

Qualifié de “crime économique” par les enquêteurs, qui ont déclenché leurs investigations suite à une plainte déposée par l’établissement lui-même, le scandale remonte à octobre 2003, date à laquelle deux chefs de bloc et un anesthésiste du CHU de Douéra ont vu dans le matériel médical et les médicaments de l’hôpital un filon d’or pour un commerce florissant. L’anesthésiste ira même jusqu’à acquérir un registre de commerce au nom de sa femme, afin de se couvrir pour écouler la marchandise, stockée préalablement dans un dépôt censé servir à cet effet.
Avec la collaboration de certains travailleurs au sein du CHU et grâce à d’autres renseignements recueillis auprès des citoyens, les services de police décident donc de passer à l’action après une enquête exhaustive. Mercredi dernier, ils ont tendu une sourcière et pris en flagrant délit les deux chefs de bloc à bord de deux véhicules transportant des produits pharmaceutiques, dont un produit anesthésique rare, le tout d’une valeur de 120 millions de centimes. Les premiers interrogatoires ont permis de remonter la filière et d’arrêter, en premier lieu, l’anesthésiste propriétaire du dépôt.

Par le biais d’un permis de perquisition délivré par le procureur de Koléa, une importante quantité de médicaments, de matériel médical comme des tensiomètres, des bistouris électriques neufs, du fil chirurgical, des tables d’opération, des respiratoires, etc. ont été récupérés sur les lieux.

Un expert dans le domaine a estimé la marchandise à plus d’un milliard de centimes, sans compter ce qui a été écoulé au préalable. Les enquêteurs ont, d’ailleurs, tenté de récupérer la marchandise vendue, au niveau principalement de cliniques privées et d’arrêter des médecins et des pharmaciens pour motif de complicité et de recel. Ces derniers sont actuellement en liberté provisoire. Ce qui devrait donner à réfléchir à leurs confères, qui ne s’embarrassent pas pour acquérir une marchandise bradée sans se soucier de l’aspect légal.

Cette affaire tombe, d’ailleurs, à point nommé pour poser le problème de la rareté des médicaments et des produits médicaux dans les établissements hospitaliers de grande envergure, comme c’est le cas des CHU. À titre d’exemple, arguant l’indisponibilité du produit, les médecins vont jusqu’à demander à leurs patients, souvent des personnes démunies, d’aller acheter, eux-mêmes, le fil chirurgical nécessaire à leur intervention (ce fil coûte pas moins de 6 à 8 DA la boîte).

Cette affaire interpelle, aussi, les responsables sur l’aspect de sécurité dans ces établissements, mais aussi et surtout le fonctionnement de l’hôpital dans sa globalité. Les services de police sont formels : il ne peut y avoir un tel détournement sans la complicité de nombreuses personnes de l’hôpital. C’est pour cette raison que les six agents de sécurité ont été auditionnés.

Nabila Saïdoun, Liberté