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Yazid Zerhouni minimise l’ampleur des incidents

lundi 29 mars 2004, par Hassiba

La visite électorale du Président-candidat hier, à Tlemcen, a donné lieu à de graves dérapages de la part de ses partisans. Ces derniers se sont violemment attaqués aux permanences locales des candidats Ali Benflis et Abdallah Djaballah.

Ces actes interviennent après d’autres incidents similaires, mais de moindre gravité avant-hier, à Relizane et auparavant à Aïn Témouchent. Le ministre de l’Intérieur n’y voit rien d’alarmant tandis que les représentants des deux candidatures ciblées dénoncent le parti pris de l’administration et accusent les partisans de Bouteflika.

Toujours égal à lui-même, Nouredine Yazid Zerhouni réapparaît tel qu’il a disparu du champ médiatique, il y a quelques semaines, en homme imperturbable et quiet.

À l’occasion de sa première sortie publique hier, après son absence du gouvernement - pour cause de maladie -, le ministre de l’Intérieur et des Collectivités locales a développé un discours serein aux antipodes de la réalité d’une élection présidentielle tumultueuse.
Devant assurer la sécurité du scrutin et de la campagne électorale, ce membre influent du gouvernement Ouyahia se veut l’homme de la situation et donne nettement l’impression d’avoir les choses en main.

Pour preuve, il considère les multiples dérapages qui émaillent depuis quelques jours déjà la campagne comme mineurs. Saccages de permanences de candidats, agressions de militants... toutes ces dérives relèvent, à ses yeux, d’“actes isolés”. “C’est marginal”, a-t-il estimé arguant du fait que 600 meetings se sont tenus depuis le 18 mars dans le calme et en présence de 400 000 personnes. Selon Zerhouni, deux ou trois incidents signalés çà et là ne peuvent aucunement influer sur le cours de la campagne électorale et être motifs à inquiétude.
Le ministre s’est fait l’écho de cette certitude au cours d’un point de presse improvisé au ministère de la Culture et de la Communication.

Invité par sa collègue Khalida Toumi à l’inauguration d’une semaine culturelle des wilayas de Boumerdès et de Blida, il s’est prêté aux questions des journalistes avec ce désir de faire du rendez-vous du 8 avril un test réussi pour l’administration. Soulignant la transparence et la régularité de l’élection, il promettra : “Ce sera un point de non-retour dans la construction d’un système républicain.”

À l’avertissement de certains candidats d’occuper la rue en cas de fraude massive au profit du Président-candidat, Zerhouni a répondu par une autre mise en garde. Il prévient contre tout éventuel débordement. Pis, il qualifie leurs auteurs, à savoir les perdants, de “gens mal éduqués et manquant de fair-play”.
En revanche, il en appelle à “la sagesse du peuple qui ne se laissera pas manipuler”, d’après lui. Manipulation, intox... toutes les informations en rapport avec une probable épreuve de rue tiennent aux yeux de Zerhouni de la pure fantaisie.

Il en est, selon lui, de cette nouvelle sur une commande d’arsenal répressif par le département de la police, éventée par un confrère. Rien à craindre donc pour les lendemains de l’élection, selon Yazid Zerhouni.
Sans soucis, le ministre de l’Intérieur se conforme, pour l’instant, au statut d’observateur. “Très moyen”, a-t-il estimé le niveau de la campagne en cours. Pour le reste, ses ennuis de santé constituent sans doute sa plus grande préoccupation. “Je vais bien et je suis lucide”, a-t-il lancé très soulagé.

Avouant être passé par “des moments très difficiles”, Zerhouni est néanmoins paru très affecté par les informations publiées sur son état de santé. “Des écrits vils et abjects”, a-t-il asséné. Pour marquer ce retour aux affaires, le ministre a croqué, hier, la vie à pleines dents, par le bout d’un bâtonnet de zlabia que lui a tendu une pâtissière de Blida, lors de sa tournée dans les stands des exposants. Paré d’un collier de jasmin, il s’est laissé guider dans les dédales du Palais de la culture, le plateau qu’il a choisi pour marquer son come-back.

Samia Lokmane

Khalida, attachée de presse !

A-t-on déjà vu un ministre de la République faire office à la fois de body-guard, d’attaché de presse et d’agent du protocole ?! La première responsable du département de la Culture et de la Communication a accompli cette prouesse, hier, en recevant au Palais de la culture son collègue de l’Intérieur. Invité à l’inauguration d’une semaine culturelle, Yazid Zerhouni s’est trouvé otage de son hôte. Lui faisant subir un marquage strict, Mme Toumi a empêché diverses fois les journalistes de l’approcher. “Les journalistes attendront”, lui a-t-elle signifié alors qu’il s’apprêtait à répondre à nos questions sur le parvis du Palais. Le prenant par la main, elle l’a ensuite conduit dans ses locaux et pris l’ascenseur en sa compagnie jusqu’à son bureau. Avant de disparaître, la ministre s’est retournée vers les nombreux reporters pour leur demander de prendre l’escalier afin de les rattraper. Cinq minutes d’interview pour une heure et demie d’attente durant laquelle la ministre s’est offert une séance de tatouage au henné. C’est peut-être cela la communication, en langage des signes.

S. L.

Le RCD de nouveau ciblé à Fréha et Irdjen

Les conseils communaux dénoncent

Le siège communal du RCD à Fréha a été pour une seconde fois, vendredi dernier, la cible d’un autre acte de sabotage. Selon les membres du conseil communal du RCD de Fréha, les auteurs de cet acte “criminel” ont été identifiés, et une plainte a été déposée contre eux au niveau du commissariat d’Azazga. Dans la déclaration rendue publique en cette circonstance, le RCD s’interroge pourquoi ces actes visent spécialement le parti de Saïd Sadi et encore la localité de Fréha qui est la vitrine d’Ath Djennad : bastion de toutes les résistances historiques.
En effet, depuis le début de la campagne électorale, qui est à son onzième jour, aucune tentative de perturber les activités des autres formations politiques n’a été enregistrée à Tizi Ouzou.

Le Chef du gouvernement a tenu un meeting pour le compte de Bouteflika à la maison de la culture Mouloud-Mammeri dans la même journée où le siège du RCD a été saccagé. Plus que cela, il a eu même droit aux applaudissements d’un délégué des archs dialoguistes reconverti. Le RCD, en revanche, bien que très largement implanté dans la région, continue de subir quelques tentatives de perturbation dans certaines localités.

Celles-ci sont menées la plupart du temps par des groupes d’adolescents qui ne sont pas en mesure de comprendre les enjeux du rejet des élections.
C’est le cas d’ailleurs de la localité d’Irdjen où un groupe composé d’une dizaine d’adolescents s’en sont pris, dans la nuit de samedi dernier, à la salle située au chef-lieu communal, où une conférence du RCD était prévue pour aujourd’hui.

Contactés hier, les membres du conseil communal d’Irdjen, indignés par ces pratiques qui ne profiteront qu’à Bouteflika, ont réaffirmé que la conférence est maintenue. “La population est consciente que le rejet des élections n’est plus une carte gagnante, car contrairement aux élections législatives et communales, ce rejet ne peut plus servir de moyen de pression ou de changement. Si on veut le changement, il faut plutôt aller voter”, a expliqué un membre de ce conseil communal.

Samir Leslous

Tournée de Ghoulamallah en France

Le RCD et les pro-Benflis indignés

L’information révélée hier par Liberté sur la tournée en France du ministre des Affaires religieuses continue de susciter de vives réactions parmi les partisans des autres candidats.
Dans un communiqué rendu public hier, le RCD-immigration souligne que “nombreux parmi ces imams, bien qu’officiant sur le territoire français, ont un lien de subordination avec le département géré par ce ministre. Ils sont en effet nommés par le ministère à Alger, souvent d’ailleurs, sur des critères discutables”.
Dans ce contexte, souligne le parti de Saïd Sadi, “cette action, menée par le ministre, est une pression à l’ endroit de ces imams, loin de l’impartialité exigée de toute institution et de l’administration plus généralement”. Le RCD, qui accuse le Président-candidat “d’instrumentaliser un lieu de culte, donc une religion, à des fins politiques”, interpelle officiellement la Commission chargée de la surveillance de l’élection présidentielle afin qu’ “elle adopte les sanctions prévues en l’espèce”.

Pour le Collectif des Algériens de France, qui soutient la candidature d’Ali Benflis, “cette tournée politique du ministre algérien du Culte démontre clairement la volonté du Président-candidat d’utiliser la religion à des fins de propagande électorale en mobilisant les militants du FIS, de l’AIS et les repentis du GIA et en activant les extrémistes pour s’assurer un second mandat”.
Dans un communiqué, le Collectif “dénonce ces dérives et cette utilisation illégale et scandaleuse des lieux de culte des musulmans de France à des fins politiques. Il s’étonne que ces actes puissent être commis ici en France au mépris des règles élémentaires de la laïcité et des valeurs fondamentales de la République”. Il entend demander des explications au ministère français de l’Intérieur.

Malgré les protestations, le ministre des Affaires religieuses, Bouabdallah Ghoulamallah, poursuivait sa tournée dans les mosquées en France pour demander aux imams algériens de soutenir la candidature d’Abdelaziz Bouteflika. Hier, il était en visite à Marseille, la deuxième ville de France où vit une importante communauté algérienne.

Lounès Guemache, Liberté