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Extraits du mémorandum algérien au G8 de Sea Island

jeudi 10 juin 2004, par Hassiba

L’Algérie se reconstruit sur des bases nouvelles depuis une quinzaine d’années.

Des étapes importantes ont été franchies dans l’établissement et le développement d’un régime politique démocratique et d’un système d’économie de marché.

Ce processus a été engagé sur la base des enseignements tirés de l’expérience antérieure d’édification du pays qui avait été dictée par les circonstances historiques extrêmement difficiles du recouvrement de son indépendance.
Le choix opéré en faveur de mutations politiques, économiques et sociales n’a pas été ébranlé par la décennie d’adversité que le peuple algérien a eu à affronter. Ni le déferlement terroriste, ni l’incompréhension de certains de nos partenaires et l’indifférence des autres, n’ont affaibli la détermination de l’Algérie à aller de l’avant.
C’est ainsi que le principe de liberté s’est affirmé et est devenu aujourd’hui le fondement de la vie politique et économique.

Au plan politique

La politique de concorde civile a contribué au rétablissement de la sécurité et au retour aux valeurs séculaires de tolérance et de dialogue du peuple algérien, favorisant ainsi l’élargissement continu du champ des libertés.
La consécration de tamazight au rang de langue nationale et la détermination des pouvoirs publics à la valoriser et à la propager, participent de cette même démarche de rassemblement du peuple algérien et d’épanouissement de toutes les dimensions de sa culture et de sa civilisation.

Le Parlement bicaméral où sont représentées les différentes sensibilités politiques du pays exerce librement ses prérogatives constitutionnelles.
L’absence de toute entrave à la création et la diffusion des organes de presse et de toute censure du contenu ont favorisé la pluralité des titres et la diversité de l’expression.
C’est dans ce contexte que le gouvernement travaille à l’élaboration d’une législation appropriée reprenant à son compte les normes appliquées pour la gestion des espaces médiatiques dans les pays de l’OCDE.

En parallèle, l’Algérie qui se relève de sa crise nationale et qui est plus déterminée que jamais à s’associer à la lutte mondiale contre le fléau du terrorisme demeure actuellement attelée à résorber les séquelles de la crise, tant en ce qui concerne :
 le traitement transparent du dossier des disparus lors de la crise,
 l’encouragement de ceux parmi les groupes terroristes activant encore à l’intérieur du pays à renoncer à cette voie du crime,
 la promotion d’une réconciliation nationale globale à travers laquelle la société algérienne préservera son unité nationale dans la diversité politique, et accompagnera la modernisation du pays loin de tout
extrémisme.

Au plan économique

La révision des lois pour les adapter à l’économie de marché est à un stade quasi final.
Le secteur privé représente aujourd’hui plus de 50% du volume des importations du pays et près des 2/3 de la croissance hors hydrocarbures.

La réforme touche également les secteurs des services, qu’il s’agisse des communications ou des banques (par exemple) même si le processus reste encore à parachever.
L’Algérie accompagne son ouverture par un effort public de soutien au développement et à la croissance, effort appelé à céder de plus en plus la place au capital privé.
C’est ainsi que les cinq dernières années ont vu un apport public à l’investissement de près de 30 milliards de dollars. Cet effort sera poursuivi pendant les cinq années à venir, offrant ainsi un marché attractif à l’investissement privé tant local qu’étranger.

La nouvelle étape : continuité stratégique et modes d’action renforcés

Pour mener le processus à bon terme et dans les meilleures conditions, l’Algérie s’est assignée, en cette nouvelle étape, six objectifs prioritaires pour lesquels elle déploie des efforts soutenus.

Premier objectif : réformer la justice pour affermir l’Etat de droit

La réforme de la justice est déjà profondément entamée. Il convient de la parachever car le système judiciaire constitue le pivot de l’Etat de droit.

Deuxième objectif : poursuite de la réforme des structures et des missions de l’Etat

Le processus engagé ambitionne donc la redéfinition de la nature même des rapports de l’Etat avec la société et avec la sphère économique, ainsi que la généralisation de modes participatifs de gestion à tous les niveaux.

L’objectif fondamental est de faire du citoyen, non plus un simple administré, mais un associé à part entière dans la gestion des affaires publiques.

Troisième objectif : développer le partenariat entre l’Etat, le secteur privé et la société civile

Les cadres de dialogue bipartite, gouvernement-mouvement syndical, et tripartite associant également patronat, ont permis d’instaurer une saine tradition de concertation sur la gestion économique et sociale du pays. Ils contribuent au nécessaire équilibre entre les impératifs de l’efficacité économique et ceux de l’équité sociale.
L’Etat s’attache à stimuler le développement de cadres adéquats de consultation et de concertation à l’échelon local.

Quatrième objectif : réformer le Code de la famille

La situation de la femme algérienne se caractérise par l’égalité en droits et devoirs dans les sphères politique, économique, éducationnelle et culturelle. Cette égalité a permis la scolarisation massive des filles dans tous les échelons de l’enseignement, l’accès de plus en plus large à la vie professionnelle et aux responsabilités politiques et économiques et aux fonctions supérieures de l’administration et de la justice.
Cette évolution sera complétée dans quelques mois par l’introduction dans le Code de la famille de nouvelles dispositions destinées à rééquilibrer les droits et devoirs des deux conjoints pour les mettre en conformité avec la Constitution, nos engagements internationaux et nos valeurs civilisationnelles.

Cinquième objectif : poursuivre la réforme de l’éducation

Cette réforme tend d’abord à réunir les conditions matérielles et pédagogiques les plus appropriées pour prendre en charge un effectif scolaire dépassant les 8 millions d’élèves (soit 25% de la population) ainsi que près de 1 million d’étudiants. C’est dans ce contexte que l’apport de l’école privée et d’universités étrangères en Algérie a été légalisé l’année dernière.
La réforme du système éducatif national porte également sur l’ouverture de ce dernier à la science et à la culture universelles, aux langues étrangères et à la coopération internationale, en même temps qu’elle porte sur la promotion des éléments constitutifs de l’identité nationale dans une projection qui s’inscrit dans la modernité et le développement.

Sixième objectif : approfondir les réformes économiques et financières

La poursuite des réformes se concentrera désormais sur la modernisation du secteur financier et bancaire pour qu’il joue pleinement son rôle dans le financement de l’économie, la rationalisation accrue de la gestion des finances publiques, une politique active de gestion de la dette, le développement du secteur privé et l’intensification du processus d’ouverture des entreprises du secteur public au
partenariat et à la privatisation.
Un objectif central de la stratégie de réformes est la diversification de la base de production industrielle, agricole et de services, pour réduire progressivement la dépendance encore excessive par rapport aux hydrocarbures.

Contraintes à surmonter et axes pour un partenariat adapté
La réussite d’un processus global de réformes tel que celui dans lequel l’Algérie est engagée, est tributaire de la levée de multiples contraintes endogènes comme l’insuffisance des capacités, et exogènes comme la surévaluation du risque Algérie.
Une autre contrainte spécifique, et non moins importante, a trait aux séquelles considérables d’une décennie de terrorisme, et qui continuent de peser sur les variables budgétaires et de ressources humaines de notre processus de croissance et de développement.
Les catastrophes naturelles n’ont, elles aussi, guère épargné l’Algérie durant ces dernières années. En effet, à une longue et sévère sécheresse, ont succédé des inondations destructrices ainsi que des séismes ayant causé des pertes en vies humaines et des dégâts de grande ampleur, à l’image du tremblement de terre du 21 mai 2003. A tout cela s’ajoute une grave invasion acridienne à laquelle l’Algérie est confrontée.
A titre d’exemple, l’effort de développement en cours en Algérie, et les séquelles de la crise grave qu’elle a traversée, doivent être pris en considération dans son éligibilité à l’aide extérieure et au développement qu’il serait injuste de définir uniquement par rapport à son revenu national, au demeurant encore fragile.

Le développement du partenariat pour la promotion de l’investissement et l’intégration de l’économie algérienne dans l’économie mondiale :
La surévaluation du risque Algérie ne peut plus se justifier par des facteurs politiques, ni par l’argument sécuritaire, ni par les données économiques et financières.
Nous attendons de nos partenaires du G8 qu’ils apportent leur contribution pour une perception correcte de la réalité politique et économique en Algérie et des opportunités considérables qu’elle offre pour l’investissement.
L’action prioritaire en partenariat devra aussi porter sur la restructuration et la mise à niveau de l’appareil productif pour aborder, dans les meilleures conditions, l’intégration à l’économie mondiale appelée à connaître un cours accéléré avec la mise en œuvre de l’Accord d’association avec l’Union européenne et l’accession de l’Algérie à l’OMC.

C’est dire que les enjeux dépassent nos frontières nationales et impliquent de la part de nos partenaires un engagement plus soutenu et une coopération rénovée.

Source : La Tribune