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L’Algérie vote pour désigner son président

jeudi 8 avril 2004, par Hassiba

L’Algérie a voté jeudi pour une élection présidentielle se résumant à un duel entre les deux favoris, le président sortant Abdelaziz Bouteflika et son ancien chef de gouvernement Ali Benflis, alors que l’armée a, pour la première fois, affirmé sa "neutralité".

Le scrutin pour désigner le troisième président de l’ère pluraliste en Algérie a débuté à 08H00 (07H00 GMT) dans le calme, sauf en Kabylie (est d’Alger) où quelques incidents ont été signalés, avec six candidats en lice dans les quelque 40.000 bureaux de vote du pays, répartis dans les 48 wilayas (départements).

En Kabylie, en fronde ouverte contre le pouvoir d’Alger, quelques bureaux de vote ont été saccagés ou incendiés par des jeunes gens répondant au mot d’ordre de grève d’une aile des âarchs (tribus kabyles) hostile à cette élection.

Malgré ces incidents, sans conséquence majeure sur le déroulement du scrutin, la Kabylie a continué à voter enregistrant un taux de participation de près de 10% à 13H00 (12H00 GMT), selon des estimations officielles. Ce taux est en nette hausse par rapport aux élections législatives de 2002, largement boycottées.

A la même heure, le taux de participation s’établissait au plan national à 33,35%.

Dix-huit millions d’Algériens étaient appelés aux urnes pour élire leur président dans un scrutin "ouvert" pour lequel l’armée, qui a toujours fait et défait les chefs d’Etat, avait pour la première fois affiché son impartialité.

Son patron, le général de corps d’armée Mohamed Lamari, a déclaré à plusieurs reprises que l’armée ne "soutenait" ni "n’était contre" aucun des candidats.

En outre, 124 observateurs internationaux ont supervisé ce scrutin, pour lequel la loi électorale a été amendée et permet aux candidats et à leurs représentants de suivre toutes les opérations de vote et de dépouillement.

Outre le président Bouteflika et M. Benflis, patron du Front de libération Nationale (FLN, ex-parti unique), se sont présentés : la porte-parole du Parti des Travailleurs Louisa Hanoune (PT, trotskyste) ; Saïd Sadi, chef du Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD, opposition laïque) ; Abdallah Djaballah, président du Mouvement de la réforme nationaleislamiste radical) ; et Ali Fawzi Rebaïne, président d’Ahd-54, un petit parti nationaliste.

L’affluence était relativement importante dans les banlieues populaires d’Alger alors que, comme de coutume, elle était faible dans les quartiers chics des hauteurs et le centre-ville.

"Je viens voter parce que je crois que, pour la première fois, le vote est libre", affirme Samir, la quarantaine, habitant d’une banlieue. "Mais je serais vraiment déçu si j’apprenais, par la suite, qu’il y a eu des magouilles".

Les femmes, traditionnellement, ont voté l’après-midi. Dans les anciens fiefs islamistes de Meftah et Larbâa (20 km au sud d’Alger), elles sont sorties en groupe et voilées.

A Alger, dans le quartier de Ben Aknoun, une sexagénaire a affirmé "voter pour celui qui va améliorer la situation du pays", sans révéler sur qui s’était porté son choix.

A El Madania, quartier populaire surplombant la baie d’Alger, Ramdane montre les six bulletins de vote qu’il a rapportés dans sa poche. "J’ai mis une enveloppe vide dans l’urne. Aucun de ces loustics ne me plaît car je suis sûr que seul le +koursi+ (fauteuil symbolisant le pouvoir : NDLR) les intéresse", affirme-t-il.

En fin d’après-midi, la capitale était calme, les marchés et les commerces ouverts, la circulation automobile fluide, en ce premier jour de week-end en Algérie.

En province, hormis les incidents de Kabylie, le vote s’est déroulé dans le calme, avec une forte participation dans les villes du sud algérien.

Si aucun candidat n’obtient la majorité des suffrages, un second tour est prévu, ce qui serait une première en Algérie.

L’Algérie a vécu sous le régime du parti unique du FLN jusqu’en 1989 quand le multipartisme a été institué. La première présidentielle pluraliste avait vu la victoire du général Liamine Zeroual en 1995, la deuxième celle de M. Bouteflika, en avril 1999.

Source : Courrier International, AFP