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La presse française et l’éléction présidentielle

mercredi 7 avril 2004, par Hassiba

Plusieurs titres de la presse quotidienne parisienne ont abordé hier l’élection présidentielle en Algérie alors que les principales chaînes de télévision diffusent depuis quelques jours des sujets de leurs envoyés spéciaux en Algérie ou des couvertures du vote en France qui a débuté le 3 avril.

Le Parisien consacre son fait du jour à l’élection présidentielle sous le titre « Présidentielle en Algérie : la tension », avec cette accroche en une « Accueil favorable pour Ali Benflis en Kabylie, dernier meeting passionné pour le président sortant, Abdelaziz Bouteflika : la tension est montée d’un ton hier à trois jours d’un scrutin présidentiel insolite. » « Les antiBouteflika dénoncent de graves irrégularités ». Dans cet article, l’envoyée spéciale du Parisien à Alger, Catherine Tardrew écrit que « tout est possible à Alger. Aussi bien la réélection haut la main jeudi soir, dès le premier tour du scrutin, d’Abdelaziz Bouteflika qu’un second tour à suspense quinze jours plus tard, comme l’a souhaité explicitement hier soir l’état-major du Front islamique du salut (FIS). Mais il est déjà une certitude : quelle qu’en soit l’issue, la présidentielle 2004 fera date. »

... « Le paradoxe de Benflis (persuadé de pouvoir l’emporter au nom de tous les antiBouteflika s’il accède au second tour) : il est l’homme du FLN, ce parti qui tire sa “gloire” de la guerre d’indépendance, mais qui s’est enfermé ensuite dans une vision “soviétique” de la société. Et pourtant, Benflis incarne, ou peu s’en faut, le changement dans l’Algérie moderne. Bouteflika ou Benflis ? Qui aurait imaginé, quand l’actualité de l’Algérie se résumait à de sanglants massacres dans le milieu des années 1990, qu’on aurait droit un jour et si vite à un tel choix dans un pays pacifié ? Vraiment, l’Algérie bouge. » L’envoyée spéciale du Figaro, Arielle Thedrel, estime que « les six candidats à l’élection présidentielle de jeudi en Algérie ont achevé hier une campagne électorale d’une grande liberté de parole, dominée par le duel entre le président sortant Abdelaziz Bouteflika et son plus dangereux adversaire, son ancien homme de confiance Ali Benflis. » La journaliste du Figaro s’est intéressée dans un long article « au nouveau djihad des islamistes algériens » ; « laminés par l’armée, les derniers groupes armés ont adopté l’idéologie et les méthodes d’Al Qaîda ».

... « Le Grand Sud pourrait constituer une base idéale de repli pour les islamistes armés. Si la pression devient trop dure pour les terroristes en Afghanistan, au Pakistan ou en Irak, déclarait récemment un responsable militaire américain, ils trouveront de nouveaux pays où se réactiver. Les régions du Sahel et du Maghreb en font partie. »... « La population algérienne n’est plus hantée par le terrorisme, mais celui-ci n’est pas mort pour autant. La restructuration des groupes armés, leur allégeance à l’idéologie djihadiste et aux méthodes d’Al Qaîda, le développement de la précarité en Algérie - la paupérisation concerne 35 % de la population, malgré des fondamentaux économiques positifs -, la crise de confiance envers l’Etat constituent un terreau favorable à une résurgence des utopies islamistes. Il y a deux mois, les funérailles d’un prédicateur salafiste, Cheikh Ahmed Sahnoun, ont ainsi rassemblé à Alger plus de 30 000 personnes, des jeunes surtout. »

Pour Florence Aubenas, l’envoyée spéciale de Libération « L’Algérie frappe les trois coups de la comédie électorale », signalant une « fin de campagne avant le duel Bouteflika-Benflis dans les urnes, jeudi ». « Et si tout ce qu’on voyait était vrai ? Et si la campagne présidentielle en Algérie, qui s’est achevée hier avant le vote de jeudi, avait réellement été cette grande fiesta “à l’américaine”, comme le martèlent les conseillers en communication des candidats ? » « Et si la “bataille” entre ces deux camps était vraiment si tendue qu’elle avait failli éclater la semaine dernière ? Les hommes d’affaires, les diplomates, les cadres avaient reçu la consigne de ne pas traîner en ville. Barrages de police un peu partout. La rumeur a couru Alger. Ça allait barder. Des permanences se sont mises à brûler. Des affiches à se déchirer. Des scandales à sortir et les titres à gonfler à la une des journaux : “Escalade de la violence”. Pour l’instant, c’est retombé. Mais est-ce qu’Alger n’a pas eu un peu peur ? Tout cela a bien eu lieu. Les électeurs l’ont bien vu, bien entendu. »

Libération publie la première de deux parties d’un reportage « Au cœur d’un pays en crise, avant l’élection présidentielle de jeudi » de son envoyée spéciale. « Algérie : les friqués du chaos » porte sur ceux qui « ont prospéré pendant la “sale guerre” des années 1990, en marge d’un système dévasté. Ils profitent aujourd’hui des vides de la loi pour “faire des affaires”. Et affichent leurs millions sans complexes. Bienvenue chez les nouveaux riches. » « A El Hamiz, une seule route a été goudronnée, lorsque le président Bouteflika a inauguré une école, voilà deux ans. Le reste est piraté, l’électricité, l’assainissement, les permis de construire, les registres de commerce. Aucune maison n’est terminée, tout est en location. Principe élémentaire : ne jamais être propriétaire. Pas de saisie possible. « Le jour où tout sera propre, c’est que l’Etat sera là. Et ce sera notre fin », rigole un commerçant. Devant les magasins, des importateurs proposent l’affaire du jour. Aujourd’hui, à saisir, deux conteneurs de jantes en alu. »

Dans son édition datée d’hier, 6 avril, Le Monde publie un reportage de son envoyée spéciale en Algérie, Florence Beaugé, depuis Mostaganem. Elle rapporte qu’« Ali Benflis appelle les Algériens à voter en masse le 8 avril pour “en finir avec le système”. Au cours des derniers jours de la campagne pour le scrutin présidentiel, le principal opposant à Abdelaziz Bouteflika a multiplié les appels à la mobilisation des électeurs. »... « Quelques minutes plus tard, Ali Benflis rejoint M. Ghozali pour condamner le régionalisme. « L’Algérie nous réunit, une fois encore, d’est en ouest », insiste-t-il... « Il y a un mois et demi, on se sentait au fond du gouffre. Aujourd’hui, nous croyons à un second tour de scrutin. Si Bouteflika gagne dès le premier tour, c’est qu’il y aura eu fraude », assure l’entourage de M. Benflis.
Dans la même édition, Le Monde publie un reportage sur la Kabylie « lasse de trois ans de crise, la Kabylie veut sortir de son isolement ». Ghania Mouffok, envoyée spéciale, conclut dans ce reportage que « comme le reste du pays, la Kabylie n’est pas loin de partager le sentiment du chroniqueur du quotidien El Watan, Chawki Amari, qui écrit : « Je crois que je vais voter juste pour avoir le sentiment d’avoir participé à une nouvelle histoire. »

Nadjia Bouzeghrane, El Watan