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Le code de la famille, qui s’inspire du Coran, ne doit pas être changé

Mme Djaballah, dite Oum Mossaâb

dimanche 21 mars 2004, par Hassiba

L’épouse de Abdallah Djaballah sort de l’ombre à l’occasion de la campagne électorale. Dans sa maison, à Draria, gardée jour et nuit par des policiers en tenue, elle reçoit des journalistes nationaux et même étrangers.

C’est bien la première fois que la conjointe du politique s’exprime devant la presse. L’occasion est à saisir pour pénétrer la sphère privée d’un islamiste radical. “Nous vivons comme tout le monde”, nous dira d’emblée Fatima Djaballah. “Écrivez plutôt Oum Mossâab [le prénom de son fils aîné]. Personne ne me connaît sous mon vrai prénom”, corrige-t-elle.

Elle nous parle, pareillement à ses deux filles aînées (les Djaballah sont parents de huit filles et d’un garçon), en arabe classique. “C’est par amour pour la langue du Coran que nous l’utilisons au quotidien”, explique-t-elle. À notre demande, Mme Djaballah consent à raconter qu’elle a épousé “le cheikh” par l’entremise d’un enseignant de l’université où il étudiait. “Je suis blidéenne, il est de Skikda. Nous n’aurions jamais pu nous rencontrer. Il a fait part à son enseignant de son intention de se marier avec une femme militante. J’activais dès ma deuxième année au lycée en animant des halaqate.” Elle refuse catégoriquement de nous laisser utiliser un enregistreur, encore moins de la prendre en photo.

Elle affirme agir ainsi par conviction. “Depuis qu’elle a mis le niqab [tchador, ndlr], nous n’avons plus de photos avec elle”, reconnaît sa fille Djihad. Oum Mossaâb est détentrice d’une licence en économie. Elle n’a pourtant jamais travaillé. “C’est par choix. Pour moi, la grande mission de la femme est d’élever ses enfants sur la base de l’authenticité et des préceptes de l’islam.” L’épouse du président d’El-Islah n’est pourtant pas une femme cloîtrée au foyer. “J’ai renoncé au travail, pas au militantisme”, précise-t-elle. Elle est membre du madjliss echoura (conseil consultatif) d’El-Islah, du secrétariat national dédié à la femme et aussi de la commission de préparation des élections.

Elle s’attelle, par ailleurs, à diffuser “la bonne parole de Dieu et de son Prophète” auprès des sœurs musulmanes. “J’organise des rencontres chez moi ou chez d’autres sœurs pour parler de la situation de la femme.” À l’approche de l’élection présidentielle, les invitations deviennent nettement plus fréquentes. “Il est très important pour nous de sensibiliser les femmes sur la nécessité de voter. Nous les incitons aussi à assumer un rôle actif dans la société, mais dans le sens positif, bien sûr”, soutient notre hôtesse.

Les cibles principales des militantes d’El-Islah sont les femmes au foyer, plus réceptives au discours conservateur. Oum Mossâab développe l’argumentaire politique de son mari pour dénoncer les événements de Sfax, la détention “jugée abusive” à Guantanamo d’Algériens, accusés d’activisme terroriste, et surtout les velléités des responsables et le combat du mouvement féminin pour la révision du code de la famille. “Le code de la famille n’est pas le Coran, comme l’a dit Louisa Hanoune. Mais ses articles fondamentaux sont inspirés du Coran. Nous ne permettrons pas que ces dispositions changent car la société doit accepter tout ce qui lui est dicté par Dieu.” Par articles “intouchables”, elle cite le tutorat sur la femme, la polygamie, le divorce unilatéral... La famille Djaballah perpétue, dans sa vie de tous les jours, les habitudes puisées dans la pure tradition islamique.

Même la préférence du patriarche pour ses nombreuses filles est expliquée par le favoritisme concédé par le Prophète à sa fille Fatima et plus généralement aux musulmanes de son époque. “Le Prophète a recommandé à l’homme d’honorer la femme”, nous rapporte Oum Mossâab en citant un verset coranique. “Être l’épouse ou la fille de Abdallah Djaballah n’est pas une contrainte mais un stimulant pour notre épanouissement. Il est affectueux avec les enfants. Il me pousse à me réaliser dans divers domaines, y compris l’écriture sur les thèmes que je maîtrise”, témoigne notre interlocutrice.

L’ambition de la famille est évidemment l’accession du chef à la magistrature suprême afin que le rêve d’une république islamique devienne réalité.

Souhila H., Liberté