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Les dispositifs de l’emploi en Algérie

dimanche 2 mai 2004, par Hassiba

Inciter les chômeurs, les jeunes notamment, à créer leur propre entreprise et donc leur emploi est la méthode utilisée aujourd’hui par les pouvoirs publics pour résorber le chômage en Algérie.
Des dispositifs ont été mis en place à cet effet.

De nouveaux “tests” sont mis sur le marché toutes les deux à trois années. En moins de dix ans, quatre formules ont été proposées dans le cadre de la politique de l’emploi. Des modifications ont été introduites dans chaque dispositif en vue de combler les lacunes et de susciter l’engouement des jeunes et des ex-salariés victimes des compressions.

Questions : a-t-on réussi à endiguer le chômage ? Quel a été l’apport des différents dispositifs dans la création de l’emploi ? A t-on réellement réussi à faire des jeunes chômeurs de véritables entrepreneurs ? Certains milieux soutiennent que ces dispositifs sont loin d’être à la portée de tous. Il y aurait des passe-droits et du favoritisme. Qu’en est-il au juste ? Les responsables de l’Ansej réfutent catégoriquement toute forme de favoritisme ou passe-droit dans l’accès aux avantages de l’agence. Documents à l’appui, ils affirment que des chômeurs anonymes ont pu lancer des projets et accéder au statut d’entrepreneur sans favoritisme et sans recommandation. Un responsable de l’agence préfère parler de contraintes qui poussent certains à remettre en cause ce dispositif. “Ce sont souvent les difficultés et les lenteurs qui incitent au doute et alimentent les rumeurs”, dira-t-il. Selon le même orateur, le parcours d’un chercheur d’emploi est loin d’être celui d’un combattant mais “c’est un parcours de création d’entreprise qui nécessite forcément le passage par plusieurs étapes avant que le projet ne voit le jour”.
Et d’expliquer que les portes de l’Ansej sont ouvertes à tous. Et c’est à partir de cette agence que les jeunes entament le processus qui doit aboutir à la création de l’entreprise. “Ils sont soutenus et aidés par l’agence jusqu’à la concrétisation du projet. Nous intervenons même pour une ligne téléphonique ou un raccordement d’électricité”, révèle le même responsable.
Des correspondances officielles entre l’agence et les banques prouvent qu’elle intervient en cas de refus d’octroi de crédits. Les banques sont certes souveraines, mais l’agence peut jouer l’intermédiaire pour trouver un terrain d’entente.

Et ceci ne peut que prolonger davantage le processus. Le retard est parfois cumulé en raison du non-respect des délais de livraison d’équipements par les fournisseurs “certains ont d’ailleurs été écartés par l’agence”, nous dit-on. Et d’ajouter que ce sont toutes ces entraves qui poussent les postulants à douter du sort de leurs projets et par ricochet, à ternir l’image de l’Ansej et ouvrir la voie à toutes sortes de spéculations.
Dans certains cas, l’agence continue de soutenir le promoteur même une fois le projet réalisé. C’est le cas, notamment, de la négociation avec la banque d’un nouvel échéancier de remboursement des crédits alloués. Mieux, l’Ansej va jusqu’à donner la priorité aux jeunes promoteurs dans l’octroi de ses différents marchés. C’est ainsi qu’un jeune promoteur qui s’est lancé dans le nettoiement s’est vu confier cette mission au niveau de l’agence pour arrondir ses fins de mois et pouvoir rembourser son crédit. Il y a lieu de rappeler, estiment les responsables de l’Ansej, que l’épineux problème du transport n’a été réglé que grâce à ce dispositif. En effet, le transport est l’un des créneaux qui a suscité un véritable engouement de la part des jeunes à telle enseigne qu’il s’est retrouvé vite saturé, mais surtout mal organisé par la tutelle, poussant à son gel en 1999.

Même son de cloche du côté du DG de l’emploi au département de tutelle. “Tous les dispositifs sont encadrés juridiquement par des décrets présidentiels et exécutifs ainsi que des circulaires d’application. Leur non-respect impliquerait forcément des sanctions”, note d’emblée M. Annane qui écarte tout favoritisme. “Je n’ai pas de contentieux concernant la non-application des textes de lois sur le terrain”, soutient-il. Et de préciser que les passe-droits ne peuvent se faire au niveau des banques, car les crédits ne sont pas octroyés par une seule personne mais tout un comité. “L’on peut connaître une personne ou deux, comme on peut corrompre une personne mais pas toute une hiérarchie”.

M. Annane s’appuie sur les résultats “positifs” et “excellents” de ce dispositif pour défendre l’image de marque de l’Ansej, “ces chiffres ne sont pas farfelus. On ne peut pas tricher quand il y a plusieurs partenaires qui interviennent”. Selon le même orateur, le favoritisme ne peut régner en maître absolu à l’Ansej, car des objectifs stratégiques y sont liés et ne peuvent être atteints qu’avec son ouverture à tous. Il cite la contribution à la lutte contre le chômage, le développement de l’économie nationale à travers le lancement de projets d’investissement et la récupération de l’épargne oisive des ménages en les incitant à investir dans le micro-crédit.
Pour le DG à l’emploi, le taux de remboursement des crédits, qui a dépassé les 70%, est une preuve suffisante de la réussite de cette formule. “Une réussite que des pratiques de passe-droits et autres n’auraient pas permis”. Il s’appuie aussi sur le nombre de projets réalisés (plus de 51 000) en estimant que le nombre de dossiers déposé ne peut être une référence. “Les gens ont tendance à déposer des dossiers partout. Ce qui compte c’est le nombre de certificats d’éligibilité accordés”. Le souhait des responsables concernés par la lutte contre le chômage est que le nombre de certificats d’éligibilité soit égal à celui des crédits accordés par les établissements financiers.
Car si l’agence se base sur la dimension sociale de la formule, la banque se base sur des réalités économiques et ne se soucie point de la résorption du chômage, rappelle M. Annane.

Et d’ajouter que pour rassurer les banques, les autorités ont mis en place des fonds de garantie de crédits pour couvrir le montant des prêts en cas de sinistre et ont introduit la représentation des banques au niveau des comités de sélection des projets. “Des décisions qui pourront inciter les banques à accorder plus facilement les crédits et à mettre fin aux lenteurs qui ouvrent la voie aux spéculations”.

Les jeunes chômeurs ont, eux aussi, leurs propres versions. L’Ansej est pratiquement la seule structure qu’ils connaissent par ouï-dire. Certains n’ont jamais tenté leur chance avec cette agence car ils sont convaincus que ça ne sert à rien. “Il faut du piston pour avoir du travail avec eux”, vous lancent-ils tout de go.
D’autres, en revanche, ont franchi le seuil de l’agence mais ont été vite dissuadés par telle ou telle condition. “J’ai peur de ne pouvoir rembourser le crédit de la banque” ; “je n’ai pas les moyens pour couvrir le montant de l’apport personnel”, ou alors “je n’ai aucun diplôme et aucune qualification”. Réticents en raison du manque d’informations, les jeunes s’adossent au mur de leurs quartiers, leur seule propriété, en attendant des jours meilleurs.

En fait, dire que les passe-droits sont à 0% au niveau de l’Ansej ou autres organismes d’emploi serait un leurre, et d’aucuns n’ignorent pas que ce genre de pratiques empoisonne le quotidien des Algériens même pour les prestations les plus anodines. Ce qui a été vérifié, cependant, est que tous les dossiers éligibles finissent par voir le jour. Mais pour ce faire, il faut s’armer de tonnes de patience et de persévérance.

Apport personnel des promoteurs
Des milliards de dinars

Selon le DG de l’emploi au département de tutelle, l’apport personnel des promoteurs se chiffre à des milliards de dinars. Une enveloppe très importante que l’État a récupérée par le lancement des dispositifs d’emplois. “D’importantes sommes étaient stockées dans les maisons sans avoir généré des intérêts alors qu’elles pouvaient constituer une bonne épargne pour l’État”.

Par Malika Ben, Liberté