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Sid-Ahmed Ghozali : « Le tyran veut rester seul »

mercredi 3 mars 2004, par nassim

Pour la seconde fois, Sid- Ahmed Ghozali est écarté de la course à la présidentielle. Comme en 1999, le Conseil constitutionnel l’a recalé. L’ancien Premier ministre parle d’une « exclusion », résultat de « la philosophie de base du régime » algérien.

Le Matin : Comment expliquez-vous que le Conseil constitutionnel ait rejeté votre candidature ?
Sid-Ahmed Ghozali : Je ne suis pas seulement éliminé par le Conseil constitutionnel. Sa décision constitue une exclusion et l’exclusion est la philosophie de base de ce régime. De toute façon, cette décision dépasse le Conseil constitutionnel, elle est ailleurs. On a vu de quelle manière la télévision est monopolisée depuis des mois, de quelle manière elle intoxique les Algériens en voulant enfoncer dans leur tête l’idée que le président est connu d’avance.

Vous affirmez donc que votre élimination ne peut pas s’expliquer par un déficit en signatures...
J’ai réuni 78 000 signatures et l’Administration nous a mis les bâtons dans les roues. Les maires ont exigé la présence en personne de chaque signataire, et les gens devaient, parfois, attendre une demi-journée ou une journée entière avant de pouvoir valider leur signature. Ces obstacles ont eu un effet sur l’opération de collecte des signatures. S’ils n’avaient pas existé, nous en aurions rassemblé plus.

Que pensez-vous du fait que des candidats moins populaires que vous ont passé le cap du Conseil constitutionnel et pas vous ?
Le tyran veut rester seul, il ne veut pas être gêné ; il élimine le maximum de candidats qui peuvent lui prendre des voix ; il élimine les candidats crédibles comme Taleb Ibrahimi et moi. Tous les deux, nous sommes des exclus parce que nous représentons des concurrents inacceptables.

Les décisions du Conseil constitutionnel sont sans appel et il n’y a pour vous aucun recours possible. Les lois devraient-elles changer ?
Les Algériens ont fini par croire que les lois sont mauvaises. Mais le problème, ce n’est pas que les lois soient inadéquates. Le problème est qu’on ne les respecte pas Toutes les lois sont bafouées et violées. Et quand la plus haute institution du pays, qui est la présidence de la République, n’est pas légitime, tout le reste n’est que bavardage.

L’avenir pour vous ?
Il y a une contradiction entre le fait de se plaindre d’une situation et de la laisser perdurer. Et donc moi, je continuerai à m’exprimer pour convaincre les Algériens de s’intéresser à la politique.

Un pronostic sur l’élection. Selon vous, elle sera à un tour ou à deux ?
On ne peut pas faire de pronostics dans une situation où toutes les règles sont faussées : dans ce match, l’arbitre est un tricheur et les juges de touche sont des tricheurs.

Propos recueillis par Katia Debbouz, Le Matin